Accès à l'information: Quel retour en arrière!
Impossible d'accéder aux délibérations du Conseil de gouvernement et des commissions parlementaires
Incroyable, la politique économique et monétaire sanctuarisée
L'adoption du projet de loi sur l'accès à l'information n'a curieusement pas mobilisé les conseillers. Seuls 33 ont voté pour, 3 contre, en plus de 8 abstentions. Pourtant, c'est un texte stratégique, dont les dispositions risquent de vider ce droit, prévu par la Constitution, de sa substance. Une situation qui semble confirmer les contraintes suscitées suite à la poursuite judiciaire de 4 journalistes, pour avoir publié des informations sur les travaux d'une commission d'enquête parlementaire (Ph. Bziouat)
Nous avons alerté, sur nos colonnes, contre les risques d'entrave à l'accès à l'information, liés à la multiplication des exceptions. Très attendu, le projet de loi sur le droit d'accès à l'information, adopté par la Chambre des conseillers mardi dernier, a confirmé ces craintes.
Curieusement, ce texte stratégique, qui a traîné pendant plusieurs mois à la 2e Chambre, n'a pas mobilisé beaucoup de conseillers lors du vote en séance plénière. Sur les 120 membres, seuls 33 ont voté pour ce texte, 3 contre, au moment où 8 membres se sont abstenus.
Ce projet de loi est en réalité un chapelet d'interdictions. Une énorme marche arrière qui limite l'accès des citoyens aux informations les concernant directement. Ces exceptions sont énumérées par l'article 7 de ce projet de loi. Il s'agit notamment des exceptions prévues par la Constitution. Le droit d'accès à l'information ne s'applique pas aux données relatives à la Défense nationale, à la sécurité intérieure et extérieure, ou encore à celles à caractère personnel.
S'y ajoutent les informations «pouvant porter atteinte aux relations avec un autre Etat ou Organisation internationale», à la politique monétaire, économique ou financière. Ce fourre-tout est clairement une volonté de soustraire la politique économique au débat. Ce texte interdit également l'accès aux données pouvant porter préjudice aux témoins et aux dénonciateurs des crimes de corruption ou de détournement de fonds.
Cette loi va aussi verrouiller l'accès aux données liées à l'action du gouvernement et du Parlement, qui concernent directement la vie quotidienne des citoyens. Une orientation qui semble confirmer les craintes suscitées suite à la décision du président de la Chambre des conseillers de poursuivre 4 journalistes, qui ont publié des informations relatives à la Commission d'enquête parlementaire sur la Caisse marocaine des retraites.
En vertu de cette nouvelle loi, qui entre en vigueur une année après sa publication au BO, plusieurs données seront désormais confidentielles. Il s'agit notamment des délibérations des Conseils des ministres et de gouvernement, mais aussi des commissions parlementaires.
Non seulement les discussions de ces différentes commissions continueront à se dérouler à huis clos, mais les personnes qui divulguent le contenu de leurs délibérations seront sous le coup de sanctions. La liste des exceptions englobe aussi les enquêtes d'investigations administratives, ainsi que les procédures judiciaires.
Le 15 Janvier 2018
Source Web : L’économiste
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