Rapport exclusif: La crise de l'éducation menace le "destin" du Maroc
Dans un rapport daté de décembre 2017, le Conseil supérieur de l'enseignement recense les tares du modèle éducatif marocain: résistance au changement, inégalités, acculturation, crise morale... les mots sont durs et les maux profonds. Décryptage.
Le très attendu rapport du Conseil supérieur de l'enseignement, de la formation et de la recherche scientifique (CSEFRS), dont nous vous livrons les premières conclusions en exclusivité, dresse d'emblée un constat sans concession: l'école marocaine est l'épicentre des inégalités et disparités sociales. Pis, elle les aggrave.
L'institution dirigée par Omar Azziman pointe les tares du modèle éducatif marocain dans ce document, long de 54 pages, intitulé "Une école de la justice sociale, une contribution à la réflexion autour du modèle de développement".
Dès les premières pages du rapport, le Conseil atteste que "les carences claires dans le domaine du développement humain engendrent des déficits dans l’éducation". Il estime que qualifiant la mise en application de la stratégie 2015-2030 pour la mise à niveau de l'éducation nationale est "hésitante" , deux ans après sa conception. Le CSEFRS tire la sonnette d'alarme. "La crise de l’éducation est une crise structurelle et morale, car elle menace l’avenir des générations montantes et le destin du pays", lit-on.
Pour l'institution, cette crise se manifeste de plusieurs manières dont le manque d’acquis chez les élèves, la non-compatibilité de ces acquis avec les besoins actuels et futurs du pays, l’acculturation quasi généralisée, la nature des valeurs apprises à l’école, l’absence d’égalité ou encore l’approfondissement des écarts.
Les disparités sociales déterminent la réussite scolaire
"Le déficit éducatif est aggravé par les disparités sociales produites et consacrées par l’école à tous les niveaux", indique le rapport, ajoutant que "les irrégularités de la gouvernance et la résistance du système à tout renouvellement transforment toute volonté de changement en réformes incomplètes".
Si le principe de mérite est la base de tout système d'éducation, le CSERFS relève que les disparités observées au niveau de la réussite scolaire en démontrent les limites, révélant que "l’origine sociale est le facteur principal".
Selon les chiffres du Programme national d'évaluation des acquis (PNEA) en 2016 cités par le rapport, "l’influence sociale (80%) est largement plus déterminante que l’influence scolaire (20%)". Le CSEFRS note ainsi que le concept de mérite personnel conduit à l’exclusion massive des élèves, "particulièrement en raison des retards accusés par la généralisation de l’enseignement obligatoire".
Le Conseil rappelle que "les étudiants possédant un ordinateur et internet à domicile ont un taux de réussite en français et en mathématiques plus élevé (53%) que ceux qui en sont dépourvus (26%)". De même, les élèves de 1ère Bac avec un parent titulaire du diplôme universitaire minimum obtiennent de meilleurs résultats (+64 pts en maths et +62 pts en sciences) que ceux ayant un parent qui ont seulement terminé le cycle du collège.
Ces disparités sont plus ou moins marquées en fonction du genre et du milieu géographique. Dans l'espace urbain, la moyenne des années de scolarisation des +15 ans s'élève à 7,13, contre 3,24 seulement dans le milieu rural, sachant que la moyenne nationale est de 5,64. Chez les hommes, cette moyenne est estimée à 6,52 contre 4,8 chez les femmes.
Les oppositions entre école privée et école publique, mais aussi entre écoles supérieures et facultés sont également pointées par le rapport. "Si l’école publique reste la plus prisée (84% pour le primaire et 91% pour le collège et le lycée), l’école privée reste le moyen d’assurer une éducation de qualité", souligne le document.
Pour ce qui est de l'enseignement supérieur, les établissements à accès limité (écoles d'ingénieurs, grandes écoles...) attirent les élèves ayant les meilleures notes au baccalauréat, tandis que les établissements à accès ouvert (facultés…) accusent un taux d’abandon très élevé (64% des étudiants quittent l’établissement sans le moindre diplôme).
Le 19 Janvier 2018
Source Web : Telquel
Les tags en relation
Les articles en relation
La réforme de l'Education sera lancée par... Abdelilah Benkirane
Le chef du gouvernement a rencontré mercredi le président du Conseil supérieur de l'éducation, de la formation et de la recherche scientifique, Omar Azz...
Forum de haut niveau pour le développement durable Le Maroc appelle à la création d’un fonds po
Le Maroc appelle à la création d’un fonds pour soutenir la mise en œuvre des ODD en Afrique Le Chef du gouvernement, Saâd Eddine El Othmani, a appelé,...
Dix-huit ans après la réforme, l’université dans le doute
Dans les filières surchargées, le quotidien absorbe les responsables Il faut instituer des prérequis à l’entrée dans toutes les facultés Les probl...
Enseignants-stagiaires: Enfin le retour à la formation
L’intégralité du contingent sera embauchée en 2017 Mise en place d’une commission pour finaliser l’accord Maintien du concours pour le recrutemen...
Éducation : Des disparités inquiétantes
En matière d’éducation, les rapports se suivent et ressemblent. Selon "l’Atlas territorial des disparités en éducation" présenté mercredi par le Conse...
Le projet de loi-cadre de l'éducation devant le Conseil Azziman
Omar Azziman, président du Conseil supérieur de l'enseignement. (Photo MAP) Avec un retard certain, le projet de loi-cadre sur l'enseignement arriv...
Enseignement supérieur Les filières classiques ont toujours la cote, mais de nouveaux métiers ém
Le palmarès 2015 des filiales les plus prisées par les jeunes étudiants confirme le choix de carrière orienté vers la médecine, l'ingénierie et l'...
Enseignement: Comment le système continue à fabriquer des cancres
Très mauvais scores en maths, arabe et français Les branches scientifique, littéraire et technologique touchées de plein fouet Le bac bientôt aucune ...
Violence en milieu scolaire au Maroc : Un phénomène de plus en plus fréquent
- La rentrée scolaire est là, un moment très attendu par certains élèves qui trépignent d’impatience de retrouver leurs camarades, mais tant redouté pa...
Le faible niveau des élèves marocains révélé par un rapport
Le rapport national PISA 2018 vient une nouvelle fois encore mettre à nu les défaillances du système éducatif marocain. Le niveau de l’enseignement baisse...
Enseignement: Hassad dénonce plus de 600 enseignants absentéistes
Le ministère de l’Education nationale, de la formation professionnelle, de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique vient de rendre publiq...
Colloque international Omar Azziman : «L’enjeu est de hisser le niveau de la recherche nationale,
Omar Azziman, président du CSEFRS, et Rahma Bourqia, directrice de l’Instance nationale d’évaluation. Omar Azziman. Omar Azziman : «L’enjeu est ...