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Tourisme/Vision 2020: Sajid se confie à L’Economiste

Tourisme/Vision 2020: Sajid se confie à L’Economiste

L'ère de la centralisation est finie: l'application des projets doit se faire localement

Renforcement des dessertes domestiques: un nouveau maillage proposé

Capitaliser sur les campagnes promotionnelles des compagnies low-cost

Pour Mohamed Sajid, ministre du Tourisme, «chaque territoire touristique a ses particularités. Pour les développer, il faut prioriser les besoins et exécuter les projets en partenariat avec les collectivités locales». Ici en visite à Fès avec Lamia Boutaleb, secrétaire d’Etat en charge du secteur (Ph. YSA)

Dans l’une de ses rares sorties médiatiques, Mohamed Sajid, ministre du Tourisme, a accordé un entretien exclusif à L’Economiste. C’était mercredi dernier, à l’occasion de sa rencontre avec les professionnels à Fès. Le ministre de tutelle se veut «pragmatique et réaliste». Pour lui, les visions Azur et 2020 ont identifié les besoins, mais pas les bons outils de réalisation.

D’où une «nouvelle priorisation» selon les potentialités de chaque région. D’ailleurs, Sajid prône une stratégie participative avec les collectivités territoriales et principalement les conseils de régions dotés de moyens financiers. Dans cet entretien, il livre également sa stratégie concernant le transport aérien, la promotion des territoires touristiques ainsi que le rôle des agences d’exécution. Décryptage.

- L’Economiste : C’est votre premier déplacement à Fès, une destination de choix pour le tourisme culturel d’élite. Avez-vous une nouvelle vision pour promouvoir davantage cette niche du territoire touristique Maroc-Centre?

- Mohamed Sajid: De façon générale, le tourisme a connu une croissance exceptionnelle ces dernières années. Le défi est de continuer sur la même tendance. Notons que le tourisme a toujours été précurseur dans les stratégies de développement. On avait connu la première stratégie avec le plan Azur, puis la Vision 2020. Ces stratégies n’ont peut-être pas abouti. Mais il ne faut pas se décourager pour autant. Il faut identifier les faiblesses et les atouts et travailler de façon pragmatique. Il ne faut pas vouloir tout faire en même temps, mais identifier les priorités et s’y focaliser. Il y a aussi un problème de gouvernance de ces projets. A ce niveau, il faut absolument définir les outils opérationnels adéquats pour chacune des régions et des provinces. Nous avons signé des programmes ambitieux où nous avons identifié un certain nombre de projets. Mais nous n’avons pas identifié le bon opérateur, le bon outil de réalisation de ces projets. Aujourd’hui, la régionalisation nous donne une opportunité incroyable que nous n’avions pas il y a 2 ou 3 ans. La Région a des compétences plus étendues et des moyens plus importants et a pour vocation de travailler au développement de la région. Nous voulons justement utiliser les outils de développement local au profit des projets touristiques d’envergure.

- Pensez-vous que les conseils régionaux et communaux ont les moyens financiers et autres pour réaliser de grands projets?

- Avec les élus et responsables locaux, nous essayons de trouver les outils nécessaires pour porter et réaliser les projets. A titre d’exemple, pour la Région Fès-Meknès, où il y a neuf provinces, des chantiers importants ont été identifiés à la fois par les collectivités locales et le ministère du Tourisme qui avait réalisé une étude préliminaire sur le développement du secteur. Aujourd’hui, il faut passer à la phase d’exécution au niveau local. Appliquer les projets recensés dans la vision, à travers une structure centrale, fait partie du passé. L'approche doit être pragmatique en impliquant davantage les collectivités territoriales dans la réalisation de leurs projets. Par exemple, le projet «Mdinti» qui est centré sur la rénovation des centres urbains en partenariat avec d’autres départements ne peut pas être exécuté par le ministère. Pour le mettre en œuvre, il faut identifier des opérateurs locaux qui seront chargés de sa réalisation. Pour le cas de Fès, l’opérateur indiqué est l’ADER (Agence de dédensification et de réhabilitation de la médina) qui a l’expertise, l’expérience et l’autonomie de gestion qui permettraient de porter les projets liés à la rénovation urbaine jusqu’au bout. Nous allons reprendre le contenu du programme «Mdinti» et le faire exécuter par cette agence avec les contributions qui étaient initialement prévues par les différents départements ministériels. Idem pour les programmes de développement du tourisme rural «Qariati». Là aussi, les projets sont identifiés. Il faut les prioriser et trouver les structures qui pourront les porter et les réaliser avec l’appui de la Région et son Agence de développement régional (ADR). Les municipalités et leurs SDL (Sociétés de développement local) seraient également d’un grand apport.

- Dans votre nouvelle approche, que prévoyez-vous pour le transport aérien?

- Le développement du transport aérien est l’un des leviers du secteur touristique. L'arrivée de plusieurs compagnies low-cost et autres dans les régions irriguent la destination avec l’avantage de faire du point à point. L’autre avantage de ces compagnies, c’est qu’elles ont leurs propres réseaux de distribution et leurs propres outils de promotion. Elles sont aussi tenues de remplir leurs avions. Du coup, elles s’impliquent et atteignent un taux de remplissage de plus de 95%. Donc, nous sommes assurés, à travers ces compagnies, d’avoir un flux suffisamment important qui peut aujourd’hui remplir nos capacités hôtelières. Il faut continuer d’accentuer le rôle de ces compagnies qui constituent de vrais outils de promotion de la destination. Nous travaillons également sur la connectivité interne entre les différentes destinations touristiques. A ce niveau, à titre d’exemple, il est anormal que Ouarzazate ne profite pas des flux qui arrivent sur le bassin de Marrakech. Créer une liaison aérienne entre ces deux estinations constitue aujourd’hui une véritable plus-value. Idem pour Fès- Marrakech avec la liaison déjà opérationnelle et qui assure des flux d’échanges entre les deux villes. En somme, nous travaillons sur la réalisation d’un vrai réseau de transport aérien domestique qui permet de relier les destinations entre elles. Un Tanger-Agadir, un Tanger-Marrakech, un Fès-Dakhla, un Fès-Errachidia et un Fès-Agadir figurent parmi nos projets de liaisons.

- Quelles sont les compagnies qui desserviront ces destinations?

- Ces vols seront assurés par RAM si elle a les capacités de le faire ou par d’autres compagnies. En tout cas, on ne peut pas se passer de ces liaisons qui sont stratégiques, non seulement pour le tourisme, mais également pour le développement économique, spatial et régional de notre pays. Pour mettre en œuvre ces nouvelles dessertes, nous nous sommes basés sur une étude réalisée par la direction de l’aviation civile. Celle-ci a démontré qu’il y a des potentialités d’ouverture de ce genre de lignes. Pour aller vite, nous sommes en contact avec les opérateurs aériens. Ces vols seront programmés très rapidement.

Fès doit lever ses blocages

Avec les acteurs locaux, le ministère du Tourisme veut renforcer l’attractivité des destinations touristiques. Ceci passera par des programmes d’animation culturelle et artistique. «Il faut travailler en synergie et offrir les meilleures conditions possibles afin de recevoir davantage de touristes. Le produit doit être mieux réparti sur tout le territoire et tous les acteurs doivent être convaincus de la nécessité d’animer la ville», estime Sajid. Et de poursuivre: «Heureusement, Fès a eu un certain nombre de manifestions culturelles, dont le festival des musiques sacrées, qui ont contribué à son rayonnement. Il faut accentuer le volet culturel, animation et patrimoine». Enfin, pour ce qui est des projets qui piétinent, dont celui de la réalisation de la zone Oued Fès, le ministre du Tourisme préconise de lever tous les blocages. Outre le déblocage du projet du Movenpick, Sajid a annoncé qu'un 2e opérateur est vivement intéressé par la réalisation d’un second hôtel au niveau de Oued Fès. «Ce sont des projets qui permettront au secteur de retrouver sa confiance, sa crédibilité et son dynamisme», conclut le ministre.

Le digital en premier

En matière de promotion, le département de Mohamed Sajid maintiendra la participation du Maroc dans les différents salons du tourisme ainsi que les moyens classiques de promotion. Toutefois, selon le ministre, «la stratégie promotionnelle est focalisée sur le numérique et le digital». «L’orientation donnée au niveau de l’ONMT est d’utiliser davantage le numérique pour mieux promouvoir notre pays», renchérit Sajid. Ce dernier annonce enfin que le processus de nomination d’un nouveau DG à la tête de l’ONMT sera lancé prochainement. Pour rappel, ce poste était occupé par Abderrafie Zouitene. L’ancien directeur de RAM France avait boosté l’activité touristique grâce notamment aux contrats co-marketing signés avec les compagnies aériennes low-cost qui desservent actuellement les principales destinations touristiques du Royaume aux côtés de RAM.

Le 23 février 2018

Source Web : L’économiste

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