Inclusion financière: Les jeunes et les femmes demeurent peu bancarisés au Maroc
Le dernier rapport annuel de Bank Al-Maghrib sur les systèmes et moyens de paiement retrace les plans stratégiques et les actions menées afin de contribuer au développement de l'inclusion financière ainsi que les obstacles qui l’encerclent. Détails.
Depuis 2007, la promotion de l’inclusion financière s’est inscrite dans les orientations et objectifs stratégiques de Bank Al-Maghrib afin de surmonter les obstacles à l’accès aux services financiers formels et de favoriser un usage responsable et régulier au profit de la population, touts segments confondus.
Il convient de rappeler que l’objectif des politiques d’inclusion financière est de mettre à la disposition des différents segments de la population des services financiers formels adaptés aux besoins pour favoriser l’amélioration de leurs conditions de vie.
BAM fait partie également de plusieurs réseaux internationaux œuvrant dans le domaine de l’inclusion financière, notamment le réseau international de l’AFI (Alliance pour l'inclusion financière) et le groupe de travail du FMA (Fonds Monétaire Arabe).
Dans le cadre de la nouvelle loi bancaire, BAM a introduit une nouvelle catégorie d’établissements, à savoir les établissements de paiement. Ce nouveau cadre permettra l’entrée sur le marché de nouveaux opérateurs non bancaires de paiement qui seront habilités, en complément des établissements de crédit, à ouvrir des comptes de paiement et à offrir des services de paiement pour leur clientèle.
Au cours des dernières années, la capillarité des réseaux bancaires et assurantiels a fortement progressé au Maroc grâce notamment au développement de réseaux cash et IOB (Intermédiaires en Opérations de Banque) qui ont joué un rôle important dans l'extension en points d’accès.
Le nombre de points d’accès bancaires a plus que doublé depuis 2010, passant de près de 4.800 à près de 12.700 points en 2017, en évolution de 22% par rapport à 2016.
Selon le rapport, l’évolution du nombre de points d’accès bancaires traduit l’efficacité des efforts des banques qui ont adapté leur modèle de distribution en diversifiant les formats de points d’accès à travers les IOB notamment.
Le réseau bancaire marocain présente une capillarité plus élevée que les pays comparables et proche de celle des pays développés, à environ 25 agences pour 100.000 adultes. Ce niveau est par exemple comparable à celui du Danemark (24 agences).
Quant au réseau d’agents d’assurance, il a crû d’environ 4% par an depuis 2010.
Toutefois, BAM souligne que cette performance en nombre de points d’accès n’est pas uniformément répartie sur le territoire.
Voici la répartition des points d’accès bancaires par région:
Cette disparité est accentuée entre le monde urbain et rural à cause de la forte concentration des points d’accès en milieu urbain. En effet, si la densité bancaire correspond à 1 point d’accès pour 2.005 adultes en moyenne, elle n’est que de 1 point d’accès pour 11.049 adultes en milieu rural.
Répartition des points d’accès entre CR et CU
Cette situation s’explique en grande partie par le modèle économique de l’agence bancaire classique qui requiert un nombre minimal de clients pour amortir les charges fixes et qui n’est pas adapté à la faible densité des zones rurales et au faible niveau de revenu dans certaines zones.
De son côté, le réseau d’assurance, malgré son développement relatif au cours des dernières années, s’avère en dessous du niveau de certains pays comparables. En 2016, le Maroc comptait 1.427 agents d’assurance et 446 courtiers, soit environ 6 agents pour 100.000 adultes contre 31 pour le Kenya, 47 pour le Mexique et 219 pour l’Inde.
Selon BAM, cette contreperformance s’explique en partie par le statut actuel de la profession d’agent dont les conditions d’exercice sont restrictives (licence universitaire, examen professionnel…).
Inclusion financière: Comment la mesurer?
L’utilisation des services financiers est mesurée à travers la pénétration des dépôts et des crédits pour les individus et les entreprises ainsi que la fréquence d’utilisation de ces services.
En termes de volume, BAM indique que des progrès significatifs ont été constatés entre 2014 et 2017 sur le nombre de comptes de dépôt (+21%), le nombre de crédits aux particuliers (+47%) ainsi que le nombre de polices d’assurance agricole qui a été multiplié par 122 depuis 2010.
La progression a également été significative en valeur avec de fortes croissances enregistrées sur les dépôts des particuliers (+18%) et l’encours des crédits aux particuliers (+22%). En ce qui concerne l’assurance, les primes non-vie ont crû de 37% sur cette même période.
Au terme de 2017, le nombre et l’encours des comptes de dépôt ont atteint 21.96 millions et 635 milliards de DH respectivement, poursuivant ainsi leur tendance haussière. Quant aux crédits bancaires aux particuliers, leur nombre a atteint 11 millions avec un encours de 265 milliards de DH. L’encours moyen a évolué comme suit :
Evolution de l’encours moyen des dépôts et des crédits
Concernant la pénétration des comptes, les résultats préliminaires de l’enquête FINDEX (publiée par la banque mondiale) conduite en 2017 montre que 29% des adultes ont un compte formel. Ce niveau est en dessous des pays comparables, en particulier par rapport aux pays qui ont développé des solutions alternatives d’inclusion financière.
FINDEX a également mesuré le taux des comptes dormants :
Du côté de l’offre, le nombre total des comptes, y compris les comptes bancaires de la diaspora marocaine, les comptes multiples par individu et les comptes dormants rapporté à la population totale est de 74% à fin décembre 2017.
En se référant à la « Centrale des Comptes » de BAM (qui inclut le nombre de titulaires de compte sans effet de multi-bancarisation), le pourcentage d’adultes disposant d’un compte bancaire ressort à 56% incluant les MRE et de 51% hors MRE.
L’écart en termes de genres
Les femmes représentent en général près du tiers des utilisateurs des services bancaires. A fin 2017, la répartition du côté « offre » est comme suit :
L’écart entre les groupes d’âge
Les résultats de FINDEX montrent que la pénétration des comptes est plus faible chez les jeunes adultes :
Ceci s’explique en partie par le niveau de chômage élevé sur cette catégorie de population. Une comparaison du taux d’inclusion financière des jeunes avec d’autres pays montre que plus le chômage des jeunes est élevé et moins leur exclusion financière est forte.
Entre les groupes de revenus
Selon FINDEX, 35% des marocains appartenant aux 60% des ménages les plus riches détiennent un compte, contre 19% des adultes appartenant aux 40% des ménages les plus pauvres. L’écart est également constaté au niveau de l’épargne et du crédit.
Quid des freins à l’inclusion financière ?
Les résultats de FINDEX ont mis en évidence un fort potentiel de financiarisation au Maroc, notamment à travers les modèles dits alternatifs (établissements de paiement...), mais aussi les principaux freins à l’inclusion financière des marocains.
Opportunités de l’inclusion financière (population en millions d’adultes)
FINDEX révèle que la faible pénétration des services financiers formels est expliquée principalement par :
> Un faible niveau de revenus des marocains :
Plus de 72% des adultes n’ayant pas de comptes considèrent l’insuffisance des fonds comme l’un des obstacles à la bancarisation. 48% des adultes non bancarisés déclarent que le manque d’argent est l’unique raison pour laquelle ils n’ont pas de compte.
> Une forte utilisation des services financiers informels :
21% de la population a recours à des solutions d’épargne, mais plus de 2/3 de cette population utilise des solutions informelles. De même, 26% des marocains ont recours à des solutions de financement dont 88% a recours à des services informels (famille, tontine « daret », avances des petits commerces, etc.).
Pour ce qui est des entreprises, une enquête conduite par la FMEF (Fondation marocaine pour l'éducation financière) au cours de 2017 auprès de 100.722 micro-entreprises et TPE montre que le faible volume d’activité (45% des sondés) est le principal frein à la bancarisation suivi par le manque de besoin (41% des sondés) et le manque de confiance en les banques (13% des sondés).
Le 21 octobre 2018
Source Web : Le Boursier
Les tags en relation
Les articles en relation
Banques: le dispositif de notation des entreprises bientôt disponible
Bank Al-Maghrib et le Groupement professionnel des banques du Maroc peaufinent les derniers ajustements en vue de la mise en place du dispositif de notation des...
#MAROC_EBE_ENTREPRISES_PRIVEES: Les vraies raisons du faible endettement bancaire des entreprises pr
L'endettement des entreprises non financières privées est d’à peine 1,44 fois leur EBE, loin du seuil des 7 fois considéré comme une limite dans le s...
La flexibilité du dirham pour début 2017
Le Maroc s’approche à grands pas de la libéralisation totale des changes. Selon Abdellatif Jouahri, gouverneur de Bank Al-Maghrib, le système de change fle...
Rapport 2018 de BAM sur les infrastructures financières Comment débrider l’inclusion financière
L’enquête de BAM sur les micro-entreprises, les TPE et les entrepreneurs individuels montre que le faible volume d’activité est le principal frein à la b...
Startups innovantes Le nouveau fonds pour les investissements verts arrive
2018 sera marquée par le lancement de «Green Innov Invest», un fonds spécialisé dans les startups innovantes opérant dans les secteurs verts et du dévelo...
Les chantiers prioritaires au Maroc selon l'OCDE
L'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) estime que le Maroc devrait se concentrer sur ses compétences, sa compétitivité e...
Au-delà de l’imagination Par Nadia SALAH
Les banques, et surtout les banquiers, entrent dans la pire période de toute leur vie professionnelle. On parle de plus de 100.000 dossiers de demandes di...
Bank Al-Maghrib: Le paiement mobile sera lancé au 1er semestre 2018
Une source autorisée à Bank Al-Maghrib a indiqué que les spécifications techniques relatives à ce nouveau moyen de paiement ont été arrêtées, mais que ...
Transferts MRE : Les USA et l’Arabie Saoudite détrônent l’Europe
Selon la Banque mondiale, un record de 9,3 milliards de dollars attendu en 2021 Le wali de Bank Al-Maghrib avait annoncé un «chiffre record» pour les tran...
Entretien avec Abdelkader Boukhris, président de la commission fiscale et réglementation des chang
«Notre plus grand regret est l'absence de la charte de l'investissement» Abdelkader Boukhris regrette l’archaïsme de la fiscalité locale qui co...
Société Générale se met au service de ses clients en ces temps de crise
Parce que s’éloigner des autres en ces temps de crise est la manière la plus sûre pour se protéger contre le Covid-19, Société Générale s’adapte aux...