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LAENSER AU BANC D’ESSAI INTERIEUR ELECTIONS RAPPORTS AVEC LA MAJORITE…

LAENSER AU BANC D’ESSAI     INTERIEUR   ELECTIONS  RAPPORTS AVEC LA MAJORITE…

GOUVERNEMENT : LA COORDINATION A UN PEU FLECHI LA PREMIERE ANNEE LE REMANIEMENT N’EST PAS UN SUJET TABOU DES CENTRES D’APPELS INTEGRES POUR RENFORCER LA PROXIMITE AVEC LA POLICE «Lorsqu’on évoque la régionalisation avancée, les gens pensent au conseil régional ou au découpage. En réalité, c’est toute la philosophie du développement du pays qui est en jeu» Son arrivée à la tête d’un département, jusque-là inaccessible pour les partis, a été l’une des principales attractions du gouvernement Benkirane. Aujourd’hui Mohand Laenser s’assume pleinement en tant que ministre de l’Intérieur et tient à occuper toute sa place. Son département en première ligne sur plusieurs dossiers n’est pas simple à gérer. Fin politicien à l’influence discrète, le patron du Mouvement populaire semble néanmoins être l’un des rares à pouvoir y naviguer sans boussole. Après Chakib Benmoussa, il a sans doute contribué à décongeler un peu plus ses arcanes même si les tiroirs ne s’y ouvrent pas facilement. Entretien. - L’Economiste: Comment gérer, lorsqu’on ne vient pas du sérail, un ministère régalien comme celui de l’Intérieur, où les ego sont démesurés et les enjeux importants? - Mohand Laenser: Je pense qu’il faut tordre le cou à certains préjugés qui veulent faire de ce ministère un département hors gouvernement. Il l’a été par ses actions mais pas par les institutions. Il faut rappeler que ce ministère a plusieurs fonctions, sécuritaires certes mais aussi des fonctions de développement local auxquelles il faut ajouter une dimension participative au développement national du fait que le département est à la confluence de plusieurs dossiers. Les walis et gouverneurs sont les représentants du pouvoir central, ne l’oublions pas. Du coup, ils sont interpellés sur des problèmes de tout genre: santé, éducation, social. Si l’on exclut les problèmes de sécurité qui ont un traitement particulier, et là tout le monde le comprend, le reste ne devrait poser aucun problème. Maintenant vous avez raison, venir dans un tel département lorsqu’on n’est pas de la maison peut poser des problèmes d’adaptation, du temps. Ma chance, c’est que je suis resté au gouvernement plus d’une quinzaine d’années. Par conséquent, j’ai eu l’occasion de voir de près comment travaille un ministère de l’Intérieur. - Justement, sur les questions de sécurité, l’opinion pense que vous n’avez pas beaucoup de marges. - Le ministre de l’Intérieur est responsable institutionnel de l’ensemble des services sous sa tutelle, y compris les directions sécuritaires: DGSN, gendarmerie, surveillance du territoire. Ces corps ont besoin d’une certaine indépendance d’action mais ceci n’empêche pas l’existence de rapports hiérarchiques qui sont là. Ce sont des services qui sont à la disposition du ministre. L’intelligence est de leur laisser toute latitude pour mener à bien leurs actions. - Vous êtes à la fois ministre de l’Intérieur et chef d’un parti politique. Vous ne craignez pas d’être accusé de conflit d’intérêt? - Le ministère de l’Intérieur a, il est vrai, une spécificité, puisqu’il est amené notamment à faire des arbitrages entre les partis, à préparer les élections. Je vous rassure, c’est une question que j’ai tranché les premiers jours puisque j’ai proposé la nomination d’un délégué général qui suit les affaires de notre formation. Je me suis donc mis en retrait du parti, et ce contrairement à beaucoup d’autres chefs de formations politiques qui sont avec nous au gouvernement y compris le chef de gouvernement lui-même! Pour autant, je ne quitte pas la direction du Mouvement populaire puisque je suis tenu par les textes qui régissent le parti. - Vous préparez la succession? - Oui, la succession est annoncée. J’ai dit au dernier conseil qu’il était temps de passer la main. Nous avons assez de cadres expérimentés capables d’assurer la relève. Légalement, les textes du parti m’autorisent à renouveler le bail pour au moins une période, mais il est évident que l’état d’esprit serait de changer le mode de gestion. Le congrès statutaire qui aura lieu en 2014 devrait trancher sur ces questions. - Un calendrier pour les élections? - La Constitution a apporté de grands changements sur le plan des collectivités territoriales. Il suffit de regarder le nombre d’articles qui y sont consacrés, lesquels sont passés à 12 ou 14 articles contre 1 à 2 avant. Il s’agit bel et bien d’une refonte du système en entier. Lorsqu’on évoque la régionalisation avancée, les gens pensent au conseil régional ou au découpage. En réalité, c’est toute la philosophie du développement du pays qui est en jeu, la question du rééquilibrage entre les régions, de l’articulation entre les provinces, les communes et l’Etat. Nous travaillons sur des textes fondateurs très importants et pour lesquels nous sommes très avancés. Sur le plan technique, nous n’avons pas de problème. En revanche, ce sont des textes qui nécessitent la plus grande adhésion. Cela ne sert à rien d’organiser des élections si les partis ne sont pas prêts. Vous avez sans doute entendu parler d’un petit texte sur le découpage qui a été présenté à la deuxième chambre et que les conseillers ont dû interpréter comme un déclenchement de l’opération. C’est dire qu’il y a beaucoup de travail, d’explication. Il y a aussi le travail sur les régions. Là aussi les partis reconnaissent que les travaux de la commission royale sont sérieux. La proposition de 12 régions avec quelques réaménagements est une bonne option. Même si certains partis souhaiteraient rester au stade actuel, je pense que nous allons dans le bon sens. - Comment interpréter le fait que le chef de gouvernement tienne à une gestion directe du dossier des élections? - Je le comprends. C’est psychologique. Ce fut le cas aussi avec le gouvernement précédent: même si les consultations étaient faites par le ministère de l’Intérieur, le Premier ministre n’était jamais loin. Je le répète, c’est surtout le préjugé qu’il faut soigner. Dans l’imaginaire populaire, les élections ne relèvent pas du chef de gouvernement, mais de l’Intérieur. - Ce ne serait pas plutôt un autre indice du déficit de coordination au sein du gouvernement Benkirane? - Je dois dire que le chef de gouvernement fait confiance totale au ministère de l’Intérieur. Il n’y a absolument pas de remise en cause de la politique que nous conduisons. Pour cette première année, il est vrai que la coordination a un peu fléchi. Les chefs de partis se comportaient plus en responsables de partis que ministres. Oui, nous avons été lents sur les réformes mais nous avons aussi réussi de bonnes choses, à commencer par boucler un budget que nous n’avions pas préparé! - Et vous pensez que les enseignements ont été tirés? - Oui, la dernière réunion de la majorité a permis d’obtenir un accord sur deux niveaux. Un, revoir la charte de la majorité pour dynamiser les réunions et la coordination entre les groupes parlementaires, les chefs de partis, certains ministres. Deux, permettre à la commission chargée de ce travail de préparer une short-list de priorités sur lesquelles nous devons nous mettre d’accord au plan orientation. - Le remaniement, toujours sur la table? - C’est un sujet parmi d’autres. Il n’est pas tabou. Je l’ai dit et répété: un gouvernement est remaniable au lendemain de sa nomination. - Votre collègue Amara critique la lenteur des réformes sur le foncier industriel. Vous vous sentez visé? - Le foncier industriel au Maroc pose problème pour plusieurs raisons. La première c’est sa rareté. La seconde c’est qu’il y a un arbitrage à faire entre des intérêts parfois contradictoires, d’un côté ceux de l’investisseur, de l’autre ceux des ayants droit. Concernant le patrimoine foncier qui relève de l’Intérieur, je précise qu’il s’agit de patrimoine des communautés collectives c’est-à-dire d’ayants droit dont il faut tenir compte pour les arbitrages. Lorsque des problèmes surviennent, c’est que parfois l’Etat signe des conventions avec des investisseurs alors que le problème du foncier n’est pas encore apuré. C’est ce qui explique certains retards. - Les terres collectives sont rattrapées par des scandales comme à El Hajeb avec un trafic de titres de propriétés… - Contrairement à ce qu’on pense, ce n’est pas le Parlement qui a soulevé l’affaire pour la première fois mais l’autorité. A l’issue d’une enquête interne, la situation a commencé à être régularisée, des naïbs démis, des personnes impliquées déférées devant la justice. C’est une escroquerie comme il peut y en avoir dans tous les secteurs. Des ayants droit avec la complicité des naïbs ont vendu ces terres à des personnes qui n’y ont pas droit. je suis sûr que ça existe dans d’autres provinces parce qu’il peut y avoir des dépassements. L’essentiel est de se donner les moyens de lutter contre ce genre d’abus avec la révision de la loi, ainsi qu’une nouvelle orientation du travail de tuteur des collectivités locales. - C’est-à-dire? - Le texte qui gère ces terres date du début du XXe siècle. Tant mieux qu’ils datent de cette époque, c’est ce qui a permis de conserver les terres de tribus sinon les colons les auraient accaparées. Le rôle du tuteur a ensuite été de continuer à protéger ces terres. L’évolution s’est produite à partir des années 80-90 lorsqu’on a commencé à utiliser ces terres pour des projets de développement, agricoles, achat et location de fermes faites par des particuliers. . Les gens se sont rendus compte que ces terres pouvaient rapporter beaucoup d’argent. C’est là où on a remarqué que la fonction de naïb devait être revue. Tout cela en prenant en considération une composante importante: le droit des femmes, les soulaliyates, lesquelles jusqu’en 2008-2009 n’avaient pas droit aux terres. - Le foncier, c’est aussi la crise comme pour les plans d’aménagements de Casablanca. - Honnêtement, on fait un mauvais procès à Casablanca et à l’agence urbaine de cette ville. S’il faut revoir la procédure c’est à l’échelle du pays et pas d’une seule ville. Sur les permis de construire, je reconnais qu’il y a trop d’intervenants: communes, habitat, agence urbaine, les régies, les pompiers, le circuit est long. . Nous sommes en train de travailler sur une facilitation des délais mais ce n’est pas simple. Chacun est maître sur un bout de décision. Il faut arriver à une loi de la construction, c’est sur quoi nous travaillons. Le vrai problème de Casablanca, c’est la raréfaction du foncier. La pression est telle que nous sommes en train de demander à l’agence urbaine de changer et de réduire les coulées vertes, les fameux espaces verts de la ville, y compris celles qui protègent l’oued Bouskoura. Voilà un type d’arbitrage difficile: d’une part choisir entre sauvegarder une ville, l’embellir, soigner sa qualité de vie, et d’autre part atténuer une pression très forte comme celle du foncier. - Le déséquilibre dans la répartition spatiale des richesses est sérieux: quatre régions seulement ont produit plus 60% du PIB entre 1998 et 2009. Vous ne pensez pas que c’est un frein pour la régionalisation? - La régionalisation n’a jamais été l’égalitarisme. Au contraire, ce chantier vise à réduire les inégalités et les déséquilibres. Maintenant que quelques régions s’accaparent l’essentiel des richesses, je ne pense pas que le Maroc fasse exception, cela se retrouve dans d’autres pays. Dans notre cas, je précise que la Constitution prévoit un fonds de mise à niveau de la région pour la doter des compétences requises pour mener à bien sa mission et un deuxième fonds de solidarité entre régions visant à assurer un développement équitable et équilibré des territoires du Royaume. - L’opinion publique ne croit pas beaucoup aux chiffres officiels sur la sécurité ? - Elle a tort. Les ratios internationaux montrent que le Maroc n’est pas en mauvaise position. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas s’améliorer. Nous avons entre 500.000 à 600.000 actes d’agression par an. Sur ce total, 87% des cas sont élucidés. Nous ne pouvons pas parler au Maroc de crime organisé. Vous avez raison de dire qu’il faut plus de sécurité, mais il ne faut pas non plus tomber dans la psychose. - Oui, mais les standards téléphoniques de la police répondent rarement la nuit. Ce n’est pas rassurant non plus. - Nous y travaillons à travers la mise en place de centres d’appels intégrés. Des fois l’on s’adresse à la police, alors qu’en réalité le besoin d’aide concerne d’autres services comme la protection civile ou les pompiers. Ceci dit, je reconnais qu’il y a un problème d’effectifs. Il y a à peine 60.000 policiers. Encore faut-il préciser qu’ils ne font pas les trois 8, et qu’il faille en déduire ceux qui sont dans les bureaux. C’est pour cela que nous insistons sur la mobilité des agents, de manière à rassurer la population. Il y a des abus aussi avec les faux appels, mais vous avez raison : il vaut mieux assumer les faux appels que de laisser tomber quelqu’un qui a besoin d’aide Ce qu’il dit de… …la situation financière des collectivités locales: “Les collectivités locales dégagent en moyenne 4 à 5 milliards de DH d’excédent par an et moins de 10% des communes qui sont fortement endettées, c’est un niveau qui reste raisonnable. Je vous rappelle qu’il y a un seul organisme qui prête aux collectivités locales au Maroc, c’est le FEC. Un fonds opère comme une banque sans l’être vraiment (c’est en projet). Le FEC n’a pas beaucoup de rentrées d’argent donc il ne peut pas aller très loin. Transport urbain, tramway, les projets qui vont chercher dans les dizaines de milliards de DH se multiplient. Cela demande des financements, des montages financiers et une réforme du FEC”.…la gestion déléguée: “On m’a fait un mauvais procès l’autre jour au Parlement. Là aussi les arbitrages sont difficiles. La gestion directe vous fait perdre de l’argent et vous avez des problèmes avec la population et des problèmes de service. La gestion déléguée n’est pas non plus la panacée lorsque le délégataire est livré à lui-même, même schéma. Le déléguant est amené parfois à mettre de l’argent pour compenser des tarifs préférentiels, pour desservir des communes nouvelles. Le délégataire pour sa part doit réaliser des investissements et, s’il n’est pas suivi, il sortira des tas d’arguments pour ne pas les faire. Ce qu’il faut en réalité, ce sont des moyens pour tenir les engagements. Il faut des ressources et des ressources humaines très compétentes car plus vous déléguez plus vous devez contrôler”. . du niveau du risque terroriste: “Il n’est pas négligeable. Notre chance est que la vigilance des services de sécurité est importante. Leur travail est pénible et je tiens d’ailleurs à leur rendre hommage encore une fois. L’opinion publique ne me contredira pas, j’en reste convaincu”. …la légalisation d’Al Adl Wal Ihssane dans la scène politique: “La balle est dans leur camp. Les règles de l’action politique au Maroc sont connues. Il y a des lois, il est bien évident que s’ils se placent dans ce cadre, ils sont les bienvenus. S’ils continuent en revanche de refuser les institutions, un tel retour ne serait pas envisageable”. SOURCE WEB par Mohamed Benabid L’Economiste Tags: régionalisation avancée-conseil régional-découpage électoral- philosophie du développement du pays- Mohand Laenser ministre de l’Intérieur- patron du Mouvement populaire- FEC, Un fonds qui opère comme une banque sans l’être vraiment- rééquilibrage entre les régions-articulation entre les provinces, les communes et l’Etat-