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L’ONCF sur les rails de 2040

L’ONCF sur les rails de 2040

S’inscrire dans une vision prospective est désormais une approche qui semble bien conforter l’Office national des chemins de fer (ONCF) dans ses choix d’extension du réseau ferré. La politique de couverture du territoire national repose ces dernières années sur des instruments de planification pour pouvoir faire bénéficier les zones non encore desservies par rails des atouts de ce mode de transport. Après son projet d’entreprise «Rihane 50», en cours de mise en œuvre (2010-2015), l’Office envisage de se doter du «Plan Maroc Rail 2040». Il s’agit d’un nouveau schéma directeur actualisé et cohérent, retraçant le développement à l’horizon 2040 du réseau ferré national dans ses différentes composantes (lignes à grande vitesse, lignes classiques, Tanger-Casablanca-Marrakech-Agadir et l’axe Maghrébin Rabat-Fès-Oujda. Ce schéma, qui nécessite un investissement total d’environ 160 MMDH, donne la part belle à la réduction du temps de parcours, à la satisfaction des besoins en mobilité et à l’amélioration de la sécurité routière. La construction d’une liaison à grande vitesse projets de modernisation et d’amélioration des performances de l’existant). À cet effet, une étude serait lancée pour plus de visibilité quant aux possibilités de développement du réseau ferroviaire à moyen et long termes. L’idée est de contribuer significativement à l’aménagement et à l’équilibre territorial. Et ceci, en phase avec les objectifs assignés aux différents plans sectoriels (Tourisme 2020, Plan Maroc vert, SAAN, Stratégie des ports à l’horizon 2030, Stratégie nationale de la logistique…). D’ailleurs, ce chantier ne serait pas le premier du genre. L’ONCF a élaboré, au cours du quinquennat précédent, deux études qui retracent, en tant que schémas directeurs, le développement de la configuration future du réseau ferré marocain, tout en tenant compte de différents aspects : évolution de la demande, stratégies sectorielles, état de l’appareil de production, contraintes et capacités de financement… Ainsi, la première étude concerne le schéma directeur national des lignes à grande vitesse, qui a conclu à la construction de 1.500 km de lignes nouvelles à l’horizon 2035, comprenant l’axe atlantique entre Tanger et Casablanca est la première étape de ce schéma qui avance, d’après le management, en ligne avec le calendrier prévisionnel. «Même avec la crise économique, le projet est en cours de réalisation. Sur le plan du montage financier, tous les fonds ont été mobilisés. Les grands travaux de terrassement et de viaducs ont bel et bien démarré», commente à ce titre Rabie Khlie, DG de l’ONCF. D’un coût de 20 MMDH, ce projet permettra la libéralisation de capacités supplémentaires pour le trafic ferroviaire de marchandises et de conteneurs entre Casablanca et le complexe portuaire Tanger-Med et comprendra une ligne nouvelle Tanger- Kénitra de 200 km, conçue pour une vitesse maximale de 350 km/h et exploitée à une vitesse commerciale de 320 km/h. Il comprend aussi les équipements ferroviaires, à savoir les voies, les systèmes de signalisation et de télécommunications, les installations électriques, l’acquisition des rames à grande vitesse et enfin, la construction d’un atelier pour leur entretien à Tanger. Hiérarchisation des projets d’extension Quant à la deuxième étude, consacrée au schéma directeur global, elle est structurée en trois catégories de projets. Il s’agit d’abord des projets d’extension du réseau, identifiés à partir d’une estimation potentielle du trafic ferroviaire des principales villes marocaines (émission/réception), réalisée sur la base d’un modèle économétrique approprié. Elle se rapporte ensuite à des projets du schéma directeur de la grande vitesse validé, constituant un cadre de référence avec ses évaluations de trafic prévisionnel, de recettes, de coûts d’investissements et d’exploitation réalisés ainsi que des projets d’accompagnement ciblés du développement constituant le noyau dur pour la mise à niveau de l’existant et l’accompagnement des projets spécifiques. Plus particulièrement, la hiérarchisation des projets d’extension a été fondée sur une analyse multicritères, en attribuant des scores à chaque projet potentiel sur la base d’une grille comportant des critères d’ordre stratégique et d’autres liés aux résultats attendus. Il s’agit de 20 nouvelles liaisons ferroviaires à mettre progressivement en service et qui nécessitent une enveloppe estimée à 94 MMDH. Sur ce même axe et dans le cadre du contrat-programme 2010-2015, il sera procédé à l’électrification et à la mise à niveau de la voie Fès-Oujda, pour un montant global de 900 MDH, dont 600 MDH sont alloués aux travaux d’électrification et 300 MDH affectés au renouvellement de la voie. La mise à niveau de cette ligne exploitée en diesel, dont la fin des travaux est prévue en 2014, permettra à l’ONCF de répondre aux besoins du trafic commercial sur le trajet Fès-Oujda et d’assurer la nouvelle desserte Taourirt-Nador. Dans le même sillage, le souverain a procédé, mercredi dernier, au lancement de la 1e phase du projet de la mise à niveau de la ligne Settat-Marrakech, pour un investissement global de 600 MDH. Ce qui permettra notamment le doublement des voies sur une distance de 40 km sur les sections Skhours-Benguerir et Sidi Ghanem-Marrakech. Ce doublement et la mise à niveau des 40 km vont permettre d’augmenter la vitesse et de réaliser un gain de temps de 30 mn sur la ligne Casablanca-Marrakech. Par la même occasion, un projet de construction de la nouvelle gare ferroviaire de Benguerir a été lancé pour un coût de 20 MDH. Dans la foulée, la stratégie nationale de la sécurisation des passages à niveau est également activée. Son coût qui devrait se hisser entre 2010 et 2015 à quelque 1,5 MMDH, sera supporté par l’ONCF, le ministère de l’Équipement et du transport, les collectivités locales et les régions. Il s’agira dans le cadre de cette stratégie d’accélérer la suppression des passages à niveau et de leur remplacement par des ouvrages différenciés et la sécurisation des passages à niveau qui ne seront pas supprimés. Selon le management de l’ONCF, 180 passages à niveau seront remplacés par des ouvrages. Quant aux passages à niveau qui ne seront pas supprimés, ils seront sécurisés grâce à un système sonore qui avise les voyageurs 35 secondes avant l’arrivée du train, à une signalisation lumineuse pour le transport routier et aussi par des barrières automatiques qui vont se fermer à l’approche du train. Chiffre d’affaires en hausse de 13% en 2013 Sur le plan de l’amélioration des services, l’ONCF procèdera à la mise en place progressive, d’ici la fin du 1e semestre 2013, de distributeurs automatiques de tickets au niveau des grandes gares et ce, dans le but de moderniser les canaux de distribution et de réduire les files d’attente aux guichets. La modernisation de 204 wagons est prévue entre 2012 et 2014 pour un coût global de 3,06 MMDH, sachant que le coût de rénovation d’un wagon serait de l’ordre de 15 MDH. À ce jour, le taux de satisfaction des voyageurs empruntant les trains est estimé à près de 64%, tel que l’indiquait, au cours de la semaine dernière au parlement, le ministre de l’Équipement et du transport, Abdelaziz Rabbah, contre 36% de mécontents vis-à-vis de la qualité des prestations de l’ONCF qui affiche un taux de régularité des trains estimé à 85%. Précisons à cet égard que sur l’axe Casa-Kénitra, dans les deux sens, le management de l’ONCF promet d’augmenter la capacité en sièges. «Il se peut que nous injections courant 2013 des navettes pour faire les 15 min, hors train de ligne», lance Khlie, qui nous a précisé que le taux d’occupation des trains entre Casablanca et Rabat est actuellement de près de 60%. Et d’ajouter, «une fois la gare Casa-port terminée, nous disposerons de la capacité de sièges nécessaire. Car, tous les trafics, hors trains de ligne vont naître de Casa Port, pour desservir l’aéroport, El Jadida, Berrechid, ainsi que Rabat et Kénitra». En somme, les prochaines années s’annoncent charnières pour l’ONCF, qui consacre une enveloppe de 7,5 MMDH aux investissements en 2013. Cette enveloppe est réservée au projet de LGV pour un montant de 4,5 MMDH et à la poursuite de la mise à niveau du réseau classique (3MMDH). Le budget 2013 de l’Office qui prévoit un chiffre d’affaires en amélioration de 3%, se base sur des hypothèses de poursuite d’une croissance soutenue de l’activité voyageurs et de la progression de l’activité fret-logistique, mais s’appuiera dans son exécution sur la poursuite des efforts pour accélérer le rythme de réalisation des investissements engagés. Pour rappel, l’effort enregistré en matière d’investissements croît d’un quinquennat à un autre. Ainsi, 7 MMDH ont été engagés au cours de la période 2002-2005, 18 MMDH au cours de la période 2005-2009 et 33 milliards pour le cycle de développement 2010-2015. Ceci a été concrétisé en doublant les voies sur les lignes à fort trafic, en shuntant des itinéraires pour réduire les temps de voyage et en raccordant le réseau à de nouveaux pôles économiques. Ceci tout en rehaussant le niveau technologique avec le recours à la grande vitesse, à travers le lancement du premier projet arabo-africain qui reliera Tanger à Casablanca dès 2015, issu d’un schéma directeur portant sur 1.500 km à l’horizon 2035. La niche touristique peut rapporter gros Outre son activité ferroviaire, l’ONCF ambitionne de s’investir davantage dans le tourisme. Il projette de développer des hôtels de différentes gammes à proximité des gares. Une ambition qui s’inscrit dans le cadre des projets de valorisation autour des gares, consistant à séparer les activités Marchandises et Maintenance de l’activité Voyageurs. «Plusieurs gammes seraient en projet en fonction des besoins, sachant que l’on a également besoin de dortoirs pour le personnel roulant. Il se peut qu’on développe des hôtels économiques, dont le coût serait moins cher comparativement à ce que nous coûtent nos dortoirs aujourd’hui», nous a confié Rabie Khlie, DG de l’ONCF. Pour ce faire, l’Office n’envisage pas de faire cavalier seul. Il compte s’allier à des professionnels dans le cadre de partenariats intelligents, pour limiter les risques de saisonnalité de l’activité touristique. «Il est probable qu’avec le partenaire qui va nous accompagner dans ce projet, nous puissions assurer de 20 à 25% de taux d’occupation pour notre personnel. Il s’agirait là d’une complémentarité avec les gares. Reste à préciser que la réalisation des unités hôtelières s’inscrit dans le cadre de la valorisation des gares», a-t-il poursuivi. Pour rappel, l’ONCF est déjà propriétaire d’unités hôtelières emblématiques. Il s’agit de la Mamounia à Marrakech, de Michelifen à Ifrane et du Palais Jamaï à Fès, confié en gestion au groupe Accor. La privatisation de l’ONCF, toute une histoire La loi sur le secteur ferroviaire, publiée en 2005, porte sur deux principaux volets. Le premier a cassé le monopole de l’État à travers l’ONCF, puisque avant 2005 seul l’État à travers l’ONCF avait la possibilité de construire une ligne ferroviaire, de la gérer et de l’exploiter avec les trains de cette ligne. À partir de 2005, l’État a ouvert le secteur, c’est-à-dire, que demain pour Marrakech-Agadir ou une ligne Khouribga-Béni Mellal, l’État peut confier la construction à un opérateur autre que l’ONCF. Idem pour la gestion de l’infrastructure et la partie opérations pour faire venir les trains. Aujourd’hui, cette proximité est là. Le deuxième volet consistait à transformer l’ONCF en SA et à signer une convention de concession avec l’État. Cela signifie que l’État donne à l’ONCF la concession du réseau existant pour une période de 50 ans. Ainsi, le secteur est ouvert et l’État peut confier le développement de nouvelles lignes à un autre opérateur que l’ONCF et lui autoriser une concession. Si le premier volet de la loi est opérationnel et applicable depuis l’entrée en vigueur de cette dernière, pour le deuxième volet, l’ONCF est confronté à un problème fiscal. La manière avec laquelle la loi a conçu la transformation de l’Office en SA fait qu’il y a un impact fiscal qui doit coûter entre 7 et 15 MMDH. Seulement, dans le cadre de la transformation du groupe OCP et de Barid Al-Maghrib en SA, ce blocage fiscal a été pris en compte et résolu par la loi de finances 2008. Ce qui a permis la transformation du groupe OCP et de Barid Al Maghrib en SA. Nous devrions maintenant amender la loi. Nous ne serons donc plus dans la logique de concession, nous devons conserver notre personnalité morale, ce qui fait que l’entité ONCF aura le réseau qui sera inscrit sur son bilan», a expliqué Rabie Khlie, DG de l’ONCF. Par Nadia BENYOUREF – lesechos.ma