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Province d’Azilal : des atouts indéniables à mettre en valeur

Province d’Azilal : des atouts indéniables à mettre en valeur

L’agriculture, le tourisme et l’artisanat sont les trois grands secteurs d’activité de la province. L’offre touristique est contrariée par l’insuffisance du réseau routier. La dégradation de l’espace végétal commence à inquiéter les défenseurs de l’environnement.

Qualifiés par les touristes de tous les descriptifs imaginables, comme la vallée heureuse pour Ait Bouguemaz, les environs d’Azilal, dans la région de Béni Mellal-Khénifra, illustrent un constat effarant. En effet, le potentiel naturel ne rime pas toujours avec aisance et développement économique. Cette région, difficile d’accès, subit aussi les méfaits de la dégradation de la faune et la flore, non sans répercussions économiques.

Altitude oblige, plusieurs patelins y étant perchés à plus de 2000 mètres, le froid impose à la population et aux activités économiques principales, à savoir l’agriculture, le tourisme et l’artisanat, un rythme saisonnier presque figé.

Une région prisée par les randonneurs

Néanmoins, en parcourant toute la contrée, la conclusion est sans équivoque : cette région à la démographie dense (voir encadré), dotée d’un riche patrimoine naturel (voir encadré Géoparc du M’goun) mais aussi des enjeux économiques difficiles, peut mieux faire.

Signe des régions enclavées du Maroc, le transport n’est assuré dans les environs d’Azilal que par les grands taxis et les transporteurs mixtes. Ces derniers ont évidemment l’exclusivité quand il s’agit de desservir les innombrables villages disséminés sur les flancs du Haut Atlas Central. En y accédant à partir de Demnate, précisément par le pont naturel Imi n’Ifri, on remarque très vite le nombre d’établissements hôteliers qui pullulent. En majorité des gîtes de montagne, ou gîtes d’étape. Plusieurs ont obtenu un label de la part du ministère du tourisme et servent surtout comme point de chute pour les randonnées pédestres dans les cols du Haut-Atlas.

C’est le cas du gîte d’étape Tizi n’Oubadou, situé au village d’Ait Blal, à une quarantaine de kilomètres de la ville de Demnate. Cet établissement accueille fréquemment des touristes marocains, amateurs de trekking, comme le confirme son gérant, Ali Ait Oubadou. Dans cette zone, le tourisme interne a pris, depuis quelques années, le dessus sur le tourisme international, pour constituer plus de 60% des nuitées, ce que nous a confirmé Mustapha Ichou, délégué provincial du tourisme à Azilal (voir interview).

Grâce, ainsi, au tourisme interne, une offre hôtelière s’est développée au fil du temps, malgré le manque de valorisation. Selon Mustapha Ichou, il y a environ 100 unités hôtelières dans la province d’Azilal, dont entre 60 et 70% sont constitués de gîtes de montagnes. «Malgré leur faible capacité litière, ces gîtes jouent un rôle crucial auprès de la population, notamment dans l’organisation des randonnées. Ils permettent de créer un nombre considérable d’emplois directs et indirects», souligne le responsable.

A Tabant, le chef-lieu d’Ait Bouguemaz situé à mi-chemin entre Ait Blal et Zaouiat Ahansal, le gîte «la Fibule Berbère» sert aussi comme point de départ de plusieurs activités dites de plein air. Son propriétaire, Mohamed Ait Nasser, dit accueillir souvent des groupes de touristes, marocains pour la majorité, qui viennent sillonner les pistes situées parfois à 3 000 m, comme le col d’Ait Imi, haut de 2 900 m. Ce dernier permet aux cyclistes de montagne d’accéder au versant sud du Haut-Atlas, notamment à la ville de Kelaât Mgouna.

Le manque de soutien souvent invoqué

M. Ait Nasser déplore en revanche le manque d’intérêt de la part des autorités. «Malgré le potentiel énorme, cette région n’a pas le soutien qu’elle mérite. Il était question à un moment donné de bénéficier de subventions dans le cadre du programme national de développement humain, une aide que nous n’avons jamais reçue. Nous manquons également d’encadrement», précise-t-il. Acteur associatif, il attire l’attention sur un autre phénomène qui est, selon lui, plus grave, à savoir l’utilisation des briques et du ciment comme matériaux de construction. Un danger qui menace l’architecture typique de la région. «Il faut absolument combattre ce phénomène. Les spécificités architecturales et le mode de construction ancien de la région, assortis à la nature, doivent être préservés. Il faut signaler qu’au niveau des communes, nous avons des textes de loi qui interdisent l’usage des matériaux cités», précise-t-il.

Le même manque de soutien est évoqué par Ahmed Benyouness, le gérant d’Atlas Kayak. Ce gîte, situé à proximité du village Tilouguite, organise des sorties de kayak et de rafting sur l’Oued Ahansal, au cours de la saison de la fonte de la neige. A en croire M. Benyouness, le lancement de son projet n’a pas été chose facile, sans aucune aide des autorités.

Une infrastructure routière insuffisante

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On en est encore loin d’une offre touristique complète, tributaire en premier lieu de l’infrastructure routière, encore insuffisante dans ces contrées. Dans le cas du village de Zaouiat Ahansal, joyaux touristique naturel, très prisé des randonneurs nationaux, la seule route goudronnée qui y mène passe par le col Tizi n’Tirghist, haut de plus de 2 600 m et couvert de neige en ce mois d’avril. A partir de ce village, les circuits de randonnée pédestre ne se comptent pas, comme celui menant au village de Taghia, situé à environ 8 km et fameux pour son passage berbère, Tasdert.

Traversant le parc national de Tamga, une piste d’environ 45 kilomètres mène de Zaouiat Ahansal au fabuleux rocher Imsefrane, connu sous le nom touristique ‘‘la Cathédrale’’. Il faut encore traverser une piste de 14 kilomètres avant d’atteindre le petit village de Tilouguite, où commence la route qui mène à Bine El Ouidane, puis Azilal. Signe des temps, certains tronçons de cette voie sont en réaménagement.

Pour Hassan Bouhrazen, gérant d’Atlas Sport, agence touristique basée à Marrakech et spécialisée dans l’organisation des circuits cyclistes, le manque d’infrastructures s’explique par l’éloignement et le grand nombre des villages, situés dans des zones reculées et abritant seulement quelques habitants.

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L’impossible équation de l’agriculture et l’environnement

Dans la vallée d’Ait Bouguemaz et aux alentours, la culture du pommier a connu une très grande expansion, «à tel point que cela a permis à l’agriculture de devancer le tourisme et l’artisanat dans l’économie de la région», confirme Mustapha Ichou. Néanmoins, cette expansion n’a pas été sans effets secondaires. L’utilisation assez poussée des pesticides commence à alerter quelques opérateurs, comme Hassan Bouhrazen. Ce dernier attire l’attention sur un autre phénomène environnemental tout aussi critique, à savoir celui de la dégradation de la forêt, causée par l’utilisation du bois au cours de la longue saison froide. «L’effet de l’utilisation du bois de la forêt est de plus en plus clair. Il n’y a pratiquement pas de genévriers dans ces montagnes, ni d’arbres autochtones, les seules capables de préserver le sol dans la région. Il est vrai que le parc de Tamga est encore riche en pin, mais ce dernier n’est pas un arbre autochtone. La seule solution est de pourvoir la population, surtout les villages situés à plus de 1600 m, en gaz», explique-t-il.

Interrogé sur le danger systémique de la dégradation des ressources naturelles dans la région, l’économiste Youness Sahibi attire l’attention sur plusieurs méfaits économiques de ce phénomène (voir p.42). En somme, et cela concerne directement cette région, la surexploitation des ressources naturelles à Azilal nuit à la durabilité de ces ressources et à l’attractivité de la région et causent une augmentation des coûts de production, sans parler du phénomène de l’exode rural, dit-il.

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Une forte densité démographique

Malgré la difficulté du terrain, Azilal, et par extension toute la région de Béni Mellal-Khénifra, demeure une des plus denses du Royaume. Selon le Recensement général de la population et de l’habitat de 2014, la densité de la population dans cette région s’élève à 93 hab/km2 et le nombre de la population à 2,5 millions. A titre de comparaison, la région de Souss-Massa, tout aussi montagneuse, mais à un degré moindre, est dotée d’un territoire plus vaste et d’une population presque aussi nombreuse (2,6 millions en 2014). Cette dernière région affiche cependant une densité de 50 hab/km2. Autre comparaison significative, la région de l’Oriental (2,3 millions en 2014) a une densité de 35 hab/km2.

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Le Géoparc de M’goun pour remédier au manque de valorisation

A Ait Blal, un site archéologique contenant des traces de dinosaures se situe à quelques encablures du village, sans signalisation. Si d’autres sites similaires dans la région sont signalisés – il en existe plusieurs à Azilal, dont Iwariden, le plus connu -, ce manque de valorisation touche aussi certains circuits de randonnées pédestres. En tout cas, s’il semble que les promoteurs ont leur mot à dire dans la région, le projet du Géoparc de M’goun devra combler ces lacunes. Pour Amina Bourquia, présidente de l’Association du Géoparc de M’goun, ce projet Unesco «devra mettre en place un territoire protégé qui comprend des géo-sites d’un grand intérêt et des lieux de valeurs écologiques, archéologiques, historiques et culturelles». Une de ses réalisations est la construction du Musée du Geoparc à Azilal, un édifice «destiné à devenir la vitrine du patrimoine naturel, culturel et paysager de la région du Haut-Atlas central».

 Publié Le 19 mai 2019

Source web Par : la vie eco

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