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Silence, on ne tourne pas à Ouarzazate !

Silence, on ne tourne pas à Ouarzazate !

Blocage du tournage d’un film français par la volonté d’un pacha

 «Le dernier voyage de Paul WR», tout le monde aura appris, à ses dépens cependant, qu’il aura été plus long que prévu. Pour ce qui est du tournage en tout cas. Grâce en soit rendue à l’inconstance de quelques agents d’autorité trop zélés à l’évidence. Le comble, c’est que cela s’est passé dans le «Hollywood marocain», Ouarzazate pour ne pas la nommer.

Venons-en aux faits : le 7 novembre courant à 13 heures sonnantes et trébuchantes, tel que l’atteste dûment le PV établi par un huissier de justice auprès du tribunal de première instance d’Ouarzazate, le pacha d’un pachalik s’est pointé pour intimer à tout un monde d’arrêter le tournage illico presto. Pour quel motif ? Car il doit bien y en avoir un. «Faute d’autorisation», aurait-il balancé.

En voilà donc un agent d’autorité très à cheval sur les règlements. On aurait été tenté d’applaudir s’il n’y avait pas un hic gros comme ça ! Le tournage  du «Dernier voyage de Paul WR» en était à sa troisième semaine. Et jusque-là tout se passait comme sur des roulettes.

Les services de la police ou de la gendarmerie étaient omniprésents pour faciliter le travail de l’équipe du film qui œuvrait dans un respect total des  règlements en vigueur.

Mais tout un staff rompu à la tâche en plus, et avec tout ce qu’une telle entreprise nécessitait comme logistique aurait donc osé passer à l’action sans se soucier de déposer une demande d’autorisation auprès des autorités compétentes ? Inimaginable pour le moins.

Le directeur de production Khaled Haffad balaie tout doute à ce propos en exhibant les copies de plus d’une demande adressée au gouverneur d’Ouarzazate et à celui d’Errachidia.

Ainsi donc, il y est spécifié à l’adresse du premier et ce, en date du 10 octobre 2019, que sa « haute bienveillance autorise notre société Lions Production & Service à tourner des séquences d’un long métrage français pour le compte de la société de production française Apaches « Le Grand voyage de Paul WR» du réalisateur Romain Quirot avec comme acteur principal Jean Reno … » tout en indiquant avec précision les lieux, les dates et l’heure correspondant au tournage.

Il y aurait, toutefois, lieu de signaler que si lesdites demandes ont été établies par écrit et remises selon une procédure suivie depuis toujours, Lions Production ayant derrière elle de longues années d’expérience dans le domaine, il en a été tout autrement de la réponse attendue de la part des autorités qui se sont mues dans un silence synonyme de consentement( ?). Certes, cela ne tient pas, juridiquement parlant. Et administrativement? «Si au niveau de Casablanca, par exemple, on a droit à des autorisations écrites, au niveau d’Ouarzazate, l’accord a toujours été verbal», précise Khalid Haffad.

Verbal. Comme l’a été d’ailleurs cet ordre du pacha, pour toute une équipe, de quitter les lieux. Il s’est obstinément refusé à signifier sa décision par écrit.

Autant dire que la verbale donne libre cours à tous les abus.

Et toujours, selon notre interlocuteur, ledit agent d’autorité aurait exigé que ce soit le Centre cinématographique marocain (C.C.M) qui s’adresse à lui en personne pour solliciter son précieux accord. Sauf que c’est loin d’être le rôle du C.C.M qui, par contre, a livré, dans les règles de l’art, sa décision d’autorisation de tournage n° 2019/DP/1491 à qui de droit.

Une décision établie en trois articles.

Article Premier :                              

La société française «Apaches S.A.S» est autorisée à procéder, à Ouarzazate, Mohammedia et Casablanca, aux prises de vues d’un long-métrage intitulé : «Le dernier voyage de Paul WR».

Article Deuxième :

Le tournage se déroulera du 09-09-2019 au 16-11-2019.

Article Troisième :

La production exécutive est assurée par la société Lions Production & Service.

Il ne serait certainement pas superflu de rappeler que ce blocage intempestif d’un tournage qui se déroulait, qui plus est, à Ouarzazate n’est certainement pas fait pour servir l’image d’une ville que l’on veut vouée au septième art.

Fannie Pailloux, la présidente et productrice de la société Apaches qui a son siège à Paris, a du mal à ravaler sa colère. Dans un écrit qui nous est parvenu, elle raconte les péripéties de ce trop fâcheux incident et les conséquences qui en ont découlé :

«Nous avons malheureusement été fortement impactés par une interruption de tournage le jeudi 7 novembre au cinéma Atlas dans Ouarzazate.

Dernier jour de tournage avec une enfant française de 13 ans, qui nous oblige et contraint à tourner dans des horaires maîtrisés sans dépassements pour les organismes français.

Ce jour-là, le PAT (Prêt à tourner) était prévu à midi. Le pacha de la ville a débarqué sur notre lieu de tournage accompagné de son adjoint et de plusieurs policiers. Il nous a donné l’ordre de stopper le tournage, prétextant qu’il n’avait pas reçu l’autorisation officielle pourtant présente avec l’original visée par le CCM et la préfecture d’Ouarzazate par mon producteur exécutif Lions Production et moi-même. Nous avons perdu plus de 3 heures 30 avec tous les techniciens et comédiens immobilisés sur place. Nous devions initialement terminer à 22h00, nous avons coupé à 02h00 du matin. L’état de fatigue et le surcoût des heures supplémentaires engendrés par cette intervention totalement abusive et inacceptable après 4 semaines et demie intensives de travail a eu de fortes répercussions sur l’équipe».

Le 26 novembre 2019

Source web Par libération

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