Faute de touristes marocains, Sebta suffoque

Les commerçants et opérateurs économiques de la ville espèrent que les frontières seront bientôt rouvertes aux touristes marocains. À défaut, l’économie sebtie risque de s’effondrer.
Alors que les commerçants et les autorités de l’enclave espéraient une réouverture des frontières terrestres début septembre, la prorogation de la fermeture vient de briser leur rêve, selon des spéculations de la presse espagnole. En effet, des rumeurs circulaient depuis quelques jours dans la presse locale autour d’un probable reprise de l’activité économique dans l’enclave. Mais la publication au Bulletin officiel espagnol de la reconduite de la fermeture des passages frontaliers avec le royaume, au moins jusqu’au 16 septembre, a porté un coup au moral des opérateurs locaux. La fermeture des frontières, faut-il le rappeler, a eu un impact considérable sur la ville, dans le secteur des services mais aussi dans le reste de l’économie. Elle a notamment malmené les finances des compagnies maritimes assurant habituellement la liaison Algesiras-Sebta en l’absence de voyageurs marocains. Le secteur des services n’est pas en reste, les travailleurs transfrontaliers marocains ne pouvant plus se déplacer quotidiennement à Sebta.
Contactés par les Inspirations ÉCO, plusieurs opérateurs économiques sebtis peinent à cacher leur désarroi. «Le moral des entrepreneurs est au plus bas. L’activité économique tourne au ralenti, si elle n’est paralysée. C’est l’absence de touristes marocains qui porte un grand préjudice à l’activité économique de la ville», confie Piku Sunderdas, fondateur de Sunder Consultores, entreprise de consulting basée dans l’enclave. Selon cet entrepreneur qui prodigue conseils et solutions aux opérateurs de la ville, le préside ne peut survivre sans l’arrivée des Marocains. «La ville recense une population de 70.000 personnes et la boutique Zara de Sebta est celle qui réalise le plus important chiffre d’affaires en comparaison avec le nombre d’habitants. C’est aussi le cas de l’enseigne allemande de supermarché Lidl. Ces performances sont réalisées grâce aux visiteurs marocains», ajoute notre interlocuteur. De fait, les touristes nationaux commençaient à occuper une place de choix dans les plans économiques et commerciaux de l’enclave. Celle-ci misait sur cette catégorie pour se délester, petit à petit, du poids du commerce contrebandier avec le Maroc. Outre le tourisme marocain et ses importantes retombées sur les caisses de la ville, Sebta collectait ses recettes à travers l’IPSI, l’impôt local. Avec la fermeture des entrepôts dédiés au commerce contrebandier, les recettes de cet impôt ont drastiquement baissé: «Nous comprenons que cette activité soit dégradante et il est plus qu’urgent de la moderniser car permettre que des personnes, en majorité des femmes, portent des fardeaux volumineux sur leur dos pour gagner leur vie est une aberration et une atteinte aux droits de ces personnes. En revanche, le tourisme est une activité qui doit être soutenue et qui pourrait offrir des solutions à long terme aux deux régions», ajoute l’entrepreneur sebti. En attendant, les médias suivent de près la situation épidémiologique au Maroc, tout en espérant que la situation se stabilise. Cependant, à en croire la presse locale, les relations entre Sebta et son voisin ne sont pas tout à fait au beau fixe. Une certaine hostilité verbale se dégage des propos du chef de l’Exécutif local, Juan Vivas, jadis plus cordial quand il s’agissait d’évaluer les relations de voisinage.
De fait, la politique locale s’est endurcie à cause de l’arrivée de l’extrême droite à l’Assemblée locale. «Il a tenu un discours très agressif, ce qui a écorné l’image de Sebta au Maroc. Il est clair qu’aucun pays n’apprécierait d’avoir comme voisin l’extrême droite qui adopte un discours insultant et dégradant», admet Pablo Guerra, entrepreneur et éditeur senti. «Il est temps que les deux parties comprennent que Sebta ne peut avancer sans le Maroc, et que le nord du Maroc a aussi besoin de Sebta pour prospérer», souligne Guerra.
Ce dernier invite les deux parties à s’aider mutuellement pour le bien de la population des deux côtés de la frontière. «Les frontières avec le Maroc ont apporté de la richesse à Sebta, c’est une évidence et nous ne pouvons le nier», admet-il. En attendant, les autorités locales ne cessent de multiplier les appels à la mise en place d’un modèle économique rompant avec cette dépendance envers le Maroc. Un souhait toutefois difficile à réaliser, du moins dans l’immédiat, de l’aveu même des opérateurs de la ville. «À moyen terme, cela est impossible. Il faudrait des années, une vision claire et de la patience pour mener à bien une nouvelle stratégie économique. Cependant, le tourisme marocain aura toujours une place importante dans l’économie de la ville», tranche le consultant sebti. «Les frontières n’ont pas été fermées unilatéralement, mais la décision est dictée par le contexte épidémiologique. Toutefois, cela nous renseigne sur ce qui pourrait se passer si l’une des deux parties fermait ses passages frontaliers. La mesure porterait l’estocade à l’économie de la ville. L’extrême droite espagnole est appelée à modérer son discours car elle a finalement compris que Sebta ne peut vivre sans le Maroc», conclut Guerra.
Source web par : les eco
Les tags en relation
Les articles en relation

Encore un rapport espagnol qui n’a pas été tendre avec le Maroc
Le marché pharmaceutique marocain, qui avait repris des couleurs en 2018, après des années de stagnation, est à nouveau d’une pâleur inquiétante. Et ...

#MAROC_Sebta_Melilla: Vers une souveraineté maroco-espagnole?
Le quotidien El Espagnol explique que le boom économique dans les provinces du nord Maroc fait suite au très grand intérêt que le roi Mohammed VI porte à c...

#MAROC_ESPAGNE_BUSINESS: La partie invisible de l’iceberg
Il est vrai que la convocation d’un ambassadeur pour fournir des explications revêt une symbolique particulière dans les traditions diplomatiques, mais cell...

Frontex place les Marocains au Top ten des passeurs La route de la Méditerranée occidentale y est
Les Marocains figurent au Top 10 des passeurs détectés par Frontex. 804 d’entre eux ont été repérés en 2017 et 1.547 au cours des deux premiers trimestr...

La courbe démographique de Sebta et Mellilia inquiète les Espagnols
“El Cano” fait la radioscopie des deux présides occupés Un rapport alarmiste vient d’être publié par l’Institut espagnol El Cano des études inte...

#MAROC_ESPAGNE_CEUTA_MELILIA:
Dans des propos tenus samedi à la chaîne saoudienne al-Sharq, le chef du gouvernement, M. El Otmani, a proposé d’ouvrir la question de la souveraineté sur...

CPT Tetouan: Voie tracée pour faire de Tetouan la capitale du tourisme ibérique dans la région.
Tétouan: Le Conseil provincial du tourisme, enfin Après une longue attente, la ville de Tétouan vient de se doter enfin d’un Conseil provincial du touri...

Maroc CESE Pour Chami: Comment peut on s'occuper au plus vite des régions qui vivaient de la contre
Nous considérons au CESE que cette décision qui s’inscrit dans une logique de souveraineté nationale, demeure une mesure nécessaire. En effet, elle permet...

Assaut massif de migrants subsahariens vers Sebta: le Maroc change de ton
800 arrestations parmi des immigrés d'origine subsaharienne et 50 blessés dont dix graves parmi les forces de l'ordre marocaines: tel est le bilan de ...

Tourisme: Al Hoceima veut se hisser au premier plan
Al Hoceima nourrit de grandes ambitions en matière de tourisme. La province dispose de divers atouts pour devenir une destination touristique de premier plan ...

Chefchaouen, le secret de la ville bleue
Chefchaouen, ou Chaouen, un joyau bleu et blanc aux pieds des montagnes du Rif. Une ville aux mille merveilles qui est un vrai musée ouvert et ô combien admir...

Sebta et Melilla bientôt sans visas ?
L’Espagne compte bien sauver l’économie de Sebta et de Melilla en y autorisant l’accès sans visa. Une mesure qui sera étudiée et en principe appliqué...