#NTIC_QUI_A_LA_SUPREMATIE_QUANTIQUE: "Suprématie quantique" revendiquée par Google : des chercheurs avancent de mêmes résultats... avec un PC classique
Trois physiciens, dont un Français, ont démontré qu'un algorithme de "compression" était capable de multiplier les performances d'un ordinateur classique au point de le rendre aussi puissant que le fameux ordinateur quantique de Google. Celui-là même qui aurait permis à la firme d'atteindre la "suprématie quantique", selon ses dires, en octobre 2019.
Il y a un peu plus d’un an, le 23 octobre 2019, Google confirmait dans le magazine Nature avoir atteint la "suprématie quantique". Théorisée en 2012 par John Preskill, professeur au California Institute of Technology (Caltech), cette "suprématie" désigne ce cap franchi par un ordinateur désormais capable d’exécuter des tâches ingérables pour une machine classique. À l’aide d’un ordinateur quantique de sa conception, l’une des équipes de Google à Santa Barbara, en Californie, assurait être parvenue pour la première fois à effectuer un calcul bien plus rapidement qu’avec les meilleurs supercalculateurs classiques. Il n’avait ainsi fallu que trois minutes et vingt secondes à son processeur pour venir à bout d’une opération extrêmement complexe, là où le plus avancé des ordinateurs actuels aurait mis 10.000 ans à la finaliser.
Nouvelle égratignure pour Google
IBM, concurrent numéro un de Google dans le domaine du quantique, n’avait pas tardé à riposter face à cette annonce en grandes pompes. Dans une publication de blog, la firme prétendait avoir développé un algorithme classique capable d’effectuer, sur une machine tout aussi classique, un calcul similaire à celui de la machine de Google… en seulement deux jours et demie. Un laps de temps bien loin des 10.000 ans, et un résultat ôtant bien du prestige à la prétendue prouesse de Google.
Aujourd’hui, c’est au tour de trois chercheurs du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et du Flatiron (une division de recherche de la fondation américaine Simons) de donner un coup de canif dans le beau château gonflable de la firme de Mountain View. À en croire leurs résultats, publiés le 23 novembre 2020 dans la Physical Review X (PRX) et relayés par le quotidien Le Monde, un simple ordinateur de bureau leur aurait permis d’égaliser avec la performance de Google. Leur méthode : "compresser" la quantité d’informations utiles au calcul. En somme, se délester des "bagages superflus" pour rouler aussi vite dans une voiture compacte que dans un coupé sport.
Pour un ordinateur classique, impossible n'est toujours pas français
Selon l’un des trois chercheurs, le physicien français Xavier Waintal, interrogé par Le Monde, la machine du géant californien n’utiliserait pas toute la puissance quantique qu'elle renferme. En réalité, seule une toute petite portion de ses capacités seraient exploitées. Pour rappel, les ordinateurs quantiques se fondent sur les propriétés de la physique quantique, qui décrit le monde à l'échelle des particules subatomiques. Ainsi, ces machines échappent aux règles de la physique classique. Elles s’appuient sur des qubits – équivalents des bits d'information dans le monde quantique –, qui utilisent les propriétés quantiques de la matière pour représenter à la fois l’état de 1 et de 0, là où les bits classiques ne peuvent opérer qu'avec une unité d'information à la fois. En conséquence, les qubits sont en mesure de prendre deux configurations simultanément au lieu d'une, multipliant ainsi de façon vertigineuse les possibilités de calcul !
Le point de bascule vers la suprématie quantique a été fixé à 50 qubits. Google, elle, a réussi à effectuer sa démonstration avec 53 qubits (son ordinateur avait pour tâche de produire des nombres aléatoires présentant des corrélations que seul un algorithme quantique peut créer). Mais "la démonstration de la suprématie quantique s'effectue en deux étapes", nous expliquait en novembre 2019 Simon Perdrix, spécialiste en information quantique au Laboratoire lorrain de recherche en informatique et ses applications (Loria, à Vandœuvre-lès-Nancy). "Il faut d’abord résoudre le problème avec un ordinateur quantique puis démontrer que la machine classique ne peut y parvenir. Et cette deuxième partie est très difficile."
Google a réagi auprès du quotidien, évoquant "un argument intéressant" de la part des trois physiciens "car il explique comment on peut simuler des réalisations expérimentales d’algorithmes quantiques". Toutefois, l'entreprise assure que la démonstration n'est plus pertinente "si le taux d’erreur est faible comme dans notre expérience". Concédant à leur tour la justesse de la remarque de Google, les chercheurs persistent et signent : "la compression d’état quantique a permis de faire des calculs avec 240 qubits sur mon PC, ce qui aurait pris "des siècles et des siècles", selon Google, sur une machine classique."
Le 08.12.2020
Source web Par : sciences et avenir
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