Akhannouch déçoit pour son Grand oral des 100 jours
Pour sa première grande sortie médiatique au terme de ses premiers 100 jours à la tête de l’exécutif, le chef du gouvernement a livré une prestation sans relief, facilité en cela par le ton conciliant de ses interviewers. Passé son long silence, il répond aux quelques interrogations soulevées soit par l’esquive ou le déni et commet surtout la faute de ne faire aucune annonce concrète
« Insipide, molle, creuse », les critiques pleuvent sur la prestation télévisuelle du chef du gouvernement, interrogé par des journalistes franchement conciliants, venus davantage exécuter une commande de communication d’Etat que de jouer leur rôle de contradicteurs incisifs. Pourquoi au fond s’en étonner, tant l’exercice, sous ce format convenu et millimétré était voué à l’échec ?
Enregistré au préalable (la veille de sa diffusion simultanée sur Al Oula et 2M), l’entretien a débordé sur une heure, au cours de laquelle Aziz Akhannouch devait répondre aux questions essentielles qui taraudent l’esprit des Marocains, celles évidemment liées à la situation sanitaire et ses conséquences dramatiques sur l’économie du pays et la vie quotidienne des citoyens.
Bien qu’il ait voulu montrer qu’il épousait l’avis dominant dans l’opinion publique sur la nécessité d’ouvrir les frontières, Akhannouch s’est barricadé derrière l’avis du comité scientifique et technique qui « étudie » toujours la question, promettant du bout des lèvres qu’une décision libératrice devrait tomber « dans les semaines qui viennent ». Si ce formalisme découle d’une logique défendable, en termes de communication, la faute est inexcusable : un chef de gouvernement ne délivre pas un Grand Oral tant attendu s’il n’a pas d’annonces concrètes à faire à la population sur un sujet aussi ardent.
De l’affaire Ait Taleb-Nabila Rmili au conflit d’intérêt de sa camarade de parti Asmaa Rhlalou à la mairie de Rabat qu’il absout par un mensonge, Akhannouch a évacué vite fait les couacs de son début de mandat sans qu’il soit repris par ses interviewers qui le laissent même qualifier sans broncher de « parasitage » les poussées de fièvre de la rue. Il n’aura pas eu non plus à s’expliquer sur la loi devant reformater le Conseil de la concurrence dévitalisé par l’affaire des hydrocarbures dans laquelle il est impliqué dans le privé.
Quant à son long silence décrié par les médias, il s’est maladroitement justifié en invoquant, contre toute attente, la singularité des élections générales de septembre et du temps, selon lui nécessaire, à mettre en place la mécanique gouvernementale dont il défend « la parfaite cohésion ».
Pour le reste, c’est surtout par l’esquive qu’il a répondu aux autres question de l’heure en passant les plats sur les promesses déjà formulées en campagne et dont il avoue la mise en branle encore poussive : l’initiative Forsa en relais du crédit Intilaka, le replâtrage de l’emploi par le programme intercalaire Awrach, de longues tirades sur « l’Etat social » dont il a pris soin de dire que l’idée n’est pas sortie du chapeau du « Nouveau modèle de développement » mais d’un chantier royal initié il y a deux décennies, tout en demeurant bien évasif sur son coût à combler. Des chiffres sortis de ses 14 années à l’Agriculture sont venus étayer des idées communes sur le stress hydrique et l’engagement à un horizon plus ou moins lointain de mener la réforme des retraites, celle de l’éducation pour laquelle il a tenu à sublimer son tout récent accord – pourtant encore bien fragile – avec les syndicats ou encore celle de la santé où il a manqué péniblement de clarté dans l’orientation qu’il compte lui donner.
Rien ne sera dit sur les questions de diplomatie qui occupent l’actualité (le Sahara à l’agenda de l’ONU, la guerre froide avec l’Algérie, les relations difficiles avec l’Allemagne, l’Espagne ou la France) expédiées par une question-réponse hyperbolique qui rappelle que le sujet est du domaine réservé du Palais.
Réglé au métronome, cet entretien imbibé de formol aura toutefois servi à confirmer qu’Akhannouch a instauré un nouveau standard à la reddition des comptes du chef du gouvernement, en rupture nette avec le style populiste de Benkirane ou celui plus insignifiant de Otmani. En cela, il s’en est sorti sans gloire avec la complicité de la télévision, mais aussi, il faut le reconnaitre, sans y laisser non plus davantage de plumes.
Le 20/01/2022
Source web par : mobile le desk
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