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Un climat malsain gagne le cinéma marocain

Un climat malsain gagne le cinéma marocain

Entretien avec le réalisateur et scénariste Mohamed Ismail La démocratisation d’un genre cinématographique « loin du public », la multiplication des festivals au Maroc, la rareté des opportunités…créent un climat malsain dans le milieu cinématographique marocain. C’est ce que pense le réalisateur scénariste Mohamed Ismail qui s’est confié à nous. Libé : Quelle est l’actualité de Mohamed Ismail ? Mohamed Ismail : Il y a de grands chantiers en cours : on a un téléfilm qui attend d’être programmé pour sa sortie en salles et, pour la première fois, je vais attaquer un feuilleton de 20 épisodes avec la SNRT qui s’appuie sur le social. Mis à part cela, un long métrage est en préparation. il porte sur un sujet complètement différent, c’est un drame psychologique. Vous vous intéressez beaucoup au social. Les révolutions qu’a connues cette année le Maghreb sont-elles de nature à vous inspirer un film ? Je crois que le public reconnaîtra justement cet important épisode de l’histoire du Maghreb dans le feuilleton auquel je faisais allusion. Il y a un peu de ce qui s’est passé dans notre région dans cette production. Il faut dire qu’on ne peut pas être en marge de ce qui se passe autour de nous. Cela dit, le feuilleton abordera ces mouvements autrement, sous une autre approche. Plus généralement, quel est votre regard sur le cinéma marocain d’aujourd’hui? Il y a forcément des reproches à faire à notre cinéma. Par exemple, je trouve qu’on crée un peu trop de festivals au Maroc sans que cela ait nécessairement un impact positif sur le cinéma. Même si on peut comprendre qu’il n’y ait pas de festival parfait, dans ce sens qu’il peut toujours avoir des problèmes d’ordre organisationnel, de programmation, etc. Mais leur nombre me paraît vraiment excessif. Qu’est-ce qui vous écœure le plus dans le milieu cinématographique national ? Je suis un professionnel qui se lève tous les jours pour aller travailler dans un secteur que j’aime, c’est-à-dire le cinéma et l’audiovisuel en général. Et la chose qui m’écœure le plus, c’est ce climat malsain qui gagne le cinéma marocain. Je trouve qu’il y a trop de trash et des problèmes qui nuisent à son image et son développement. Je pense que pour faire un bon film, il faut un certain nombre de critères. Il se trouve que ces critères tendent à disparaître. Il est regrettable que le montage financier devienne une grande problématique. Est-ce là une réalité récente que vous nous décrivez ? On le ressent davantage. On n’arrive plus à monter nos films, il n’y a pas plus de salles, moins d’opportunités et le pire, on voit monter un autre genre de cinéma très loin du public. Des films marocains ont fait l’ouverture et la clôture du Festival du film de Marrakech qui s’est achevé récemment. Quel commentaire vous inspire cette initiative ? On n’a rien compris à cette initiative. Pour tout vous dire, on était un peu surpris de voir un film d’ouverture en compétition. Cela dit, je pense que tout s’est finalement bien passé : tout le monde a accepté voire adhéré à cette initiative. Les films d’ouverture sont généralement très peu suivis vu qu’un diner est prévu après la cérémonie d’ouverture. Et là, à ma grande surprise, personne n’a quitté la salle. C’est sûrement une première de Marrakech 11 ans après son lancement, pensez-vous que le FIFM a véritablement apporté quelque chose à l’image du Maroc et au monde des arts ? Je pense que tout le monde a pu apprécier les apports du Festival du film de Marrakech dès sa seconde édition. Aujourd’hui on peut dire, sans se tromper, que le FIFM a pris une dimension internationale et qu’il figure désormais sur la carte des festivals drainant les grands noms du cinéma mondial. C’est une vitrine pour le Maroc à l’international. Les fruits sont nombreux et visibles, il n’y a qu’à voir le nombre de films étrangers notamment américains qui se tournent chez nous. Par ailleurs, le Festival de Marrakech est un événement qui célèbre la tolérance, la cohabitation et cette image profonde du Maroc qu’on essaie tous d’exporter. Il y a plus de choses positives que négatives à retenir de ce rendez-vous. Lundi 19 Décembre 2011 SOURCE WEB Propos recueillis par ALAIN BOUITHY Libération