Fès: Quel avenir pour une ville en faillite?
440 commerçants signent une pétition contre le wali
Une crise économique et de gouvernance sans précédent
Commerçants et industriels chôment à Fès. Pas moins de 9 unités de textile ont baissé leur rideau cette année. Les commerçants de la médina menacent de fermer en guise de grève. Face à cette situation, les membres de la CCIS réclament des mesures d’urgence (Ph. Y.S.A.)
Le monde des affaires de la région Fès-Meknès tire la sonnette d’alarme. Fermeture d’unités industrielles, crise économique, insécurité et absence d’interlocuteur…sont les maux décriés par les élus de la Chambre de commerce d’industrie et de services (CCIS). Ces derniers sont atterrés. En tête, Jaouad El Marhoum, membre de la CCIS, pour qui «les autorités locales et élues doivent agir d’urgence».
Même son de cloche auprès de Abdelkrim El Malhi et Saâd Akesbi, pour qui «le désespoir économique et le marasme social gagnent une grande partie de la ville». «Nous adressons depuis 2 ans des courriers revendicatifs aux walis de la région et présidents des conseils régional et communal…mais sans réponse», disent-ils.
Munis d’une pétition signée par quelque 440 commerçants, les représentants de la CCIS affirment qu’en guise de protestation, tous les commerces de la médina menacent de faire grève. Face au «mutisme» des dirigeants de la région, El Marhoum compte démissionner de la CCIS et porter les doléances de la ville devant le ministre de l’Intérieur. Car, selon lui, Fès est tristement connue par des projets lancés mais inachevés, arrêtés ou en cours de lancement.
«Nous ne comprenons pas pourquoi les projets de la ville n’aboutissent jamais», dénonce un opérateur. «Je commence à croire que c’est voulu. Où sont El Azami et Laenser…je veux seulement poser pour une photo souvenir avec ces personnalités portées disparues», ironise Mohamed Aarab, un militant associatif. «Pourtant, ces élus promettaient des projets qui devraient favoriser l’émergence d’une dynamique socioéconomique en adéquation avec les objectifs escomptés à l’échéance 2017», renchérit-il. Aujourd’hui, voyant ces blocages, des opérateurs s’inquiètent sur l’avenir de la destination. Entourée de quartiers pauvres, de poches de bidonvilles et de localités rurales où le taux de chômage frôle les 50%, Fès est, pour beaucoup, «une poudrière». Et ses faiblesses s’amplifient de jour en jour.
Pour y remédier, il faut renforcer la plateforme des zones d’accueil des investissements touristiques, industriels et culturels. Fès est une ville qui se vend par son passé mythique, sa personnalité culturelle et son urbanité.
Dans ce sens, la création d’un parc industriel à Ras El Maa, un parc des métiers de cuir à Aïn Chegag et une zone de dédouanement boostera l’activité économique. A noter que la concrétisation de ces opérations est inévitable si l’on veut éradiquer les maux socioéconomiques. Pour y arriver, trois projets majeurs doivent être impulsés. Il s’agit d’abord de la nouvelle zone touristique Oued Fès. Ce projet, appelé à transformer un espace stratégique de la ville en renforçant la capacité d’hébergement (5.000 lits), apportera une grande valeur ajoutée en terme d’aménagement urbain et paysager.
L’autre chantier d’envergure est celui des nouvelles zones d’urbanisation (Pôle ouest et Pôle sud de Fès) qui vont être dédiées à l’habitat de standing moyen, résidentiel et touristique.
En gros, 3.000 hectares sont en cours d’urbanisation. D’autres opérations doivent suivre. Elles concerneront le lancement de la zone Ouislane, les niches de tourisme rural et le renforcement de l’animation.
Notons que Fès se distingue par deux produits uniques. Primo, il y a le thermalisme, via la station Moulay Yacoub, et qui peut devenir, à travers le bien-être, une niche intéressante. Enfin, il y a la niche spirituelle avec le triangle Moulay Idriss, Al Quarawiyine et Sidi Ahmed Tijani. Outre l’impact du tourisme intérieur, le pèlerinage à Sidi Ahmed Tijani constitue un vecteur pour la promotion du tourisme spirituel notamment dans l’Afrique subsaharienne.
Un taux de chômage de 18%
A la CCIS, comme à la CGEM, on croit dur comme fer que la réalisation du Parc industriel intégré (P2I), un projet qui piétine depuis plus de 7 ans, devrait renforcer l’attractivité économique de la ville. En attendant, la ville de Fès a enregistré une nette baisse de son PIB. Elle est classée 8e alors qu’elle était juste derrière Casablanca. «Aussi, le taux de chômage enregistré à Fès est de 18%...c’est plus élevé qu’au niveau national», signalait récemment Nizar Baraka, président du CESE. Aussi, l’indice de la consommation s’est détérioré de la 3e à la 6e place.
Pour y remédier, les opérateurs réclament une intervention royale. «Ce qu’il faut, ce sont des mesures incitatives propres à la région», souligne-t-on. Ces mesures seront le vecteur fondamental pour la relance socioéconomique regroupant tous les acteurs publics et privés dans le cadre d’un programme prédéfini assurant une visibilité et une prévisibilité économique, financière et fiscale. «En gros, nous demandons des chantiers qui sont censés redynamiser l’activité économique de la ville, créer des emplois et réduire les disparités sociales», concluent-ils.
Le 07 août 2017
SOURCE WEB Par L’économiste
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