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Recyclage Des associations tirent la sonnette d’alarme

Recyclage  Des associations tirent la sonnette d’alarme

 

La société civile appelle les pouvoirs publics à l’élaboration d’une nouvelle stratégie de gestion des déchets.

 

Le lixiviat, un liquide dangereux généré par la fermentation des déchets, pollue les cours d’eau et la nappe phréatique.

Il existe au Maroc plus de 300 décharges sauvages. Malgré l’adoption de la loi 28.00 relative à la gestion des déchets et leur élimination en juillet 2006, l’élaboration de quelques décrets d’application et la mise en place d’un Programme national des déchets ménagers (PNDM) avec un budget de 40 milliards de DH, les objectifs de cette politique nationale, selon la société civile, n’ont pas été au rendez-vous.  Ainsi, le réseau des associations de défense de l’environnement «Écolo plateforme du Maroc du Nord», alerte les pouvoirs publics sur la gestion de la décharge de Berkane.


Selon ce réseau, le lixiviat, un liquide dangereux, généré par la fermentation des déchets, pollue les cours d’eau et la nappe phréatique. Selon une étude, réalisée par ce réseau, le lixiviat a atteint des puits situés à 6 km de cette décharge.

Autre voix, celle de l’Association pour un contrat mondial de l’eau (ACME-Maroc), qui vient de lancer un appel à l’opinion publique pour demander une évaluation de la gestion déléguée à la lumière de ce qui vient de se dérouler dernièrement dans ce secteur.

Pour sa part, l’Association marocaine des experts en gestion des déchets et en environnement (AMEDE), qui a organisé dernièrement son premier «Café de l’AMEDE» à Rabat, sur le thème «Défis juridiques pour une meilleure gestion du secteur des déchets au Maroc», a dressé, elle aussi, un bilan négatif de la gestion des déchets.  

Selon des intervenants à cette rencontre, la loi 28.00, relative à la gestion des déchets, a réalisé des progrès en matière de collecte des déchets dans le milieu urbain, mais plusieurs problèmes persistent

Parmi les autres difficultés du secteur, la politique de tout enterrer dans les décharges n’est plus tenable au moment où les ressources naturelles se réduisent face à une demande de plus en plus en augmentation et des prix qui ne cessent de croître.  La politique du «tout enfouir» génère d’autres problèmes tels que les mauvaises odeurs qui sont très dangereuses pour la santé. Sur ce registre, il faut citer les décharges d’Oum Azza à Rabat, Médiouna à Casablanca et bien d’autres à travers le territoire national.

Autre défaillance, il n’existe pas encore de centres de traitement des déchets dangereux. Jusqu’à maintenant, il n’existe pas un contrôle sur le devenir d’une grande partie de ces déchets. Pire, les déchets dangereux et domestiques sont déposés ensemble dans les décharges, alors que la loi stipule de le séparer.

Si le ministère de tutelle indique avoir réalisé une douzaine de décharges contrôlées, des experts indiquent qu’à l’exception de deux décharges vraiment contrôlées, le reste ne répond pas aux normes internationales. «Nous avons construit des décharges, mais il n’y a pas d’ingénieurs ou de techniciens spécialisés au niveau communal pour contrôler les cahiers de charges», a indiqué Hassan Chouata, président de l’AMEDE. Pour Mohamed Ftouhi, professeur à la Faculté des sciences de l’éducation à l’Université Mohammed V-Souissi de Rabat et président du Club marocain pour l’environnement et le développement (CMED), «la responsabilité de l’état actuel, relève de l’administration, du secteur privé et des citoyens. Il faut sensibiliser toutes ces parties prenantes via une campagne de communication.

Par la suite, nous devons créer un lobby». Parmi les principales recommandations de la rencontre de l’AMEDE, les participants ont appelé le ministère de l’Intérieur et celui de l’Énergie à s’assoir ensemble pour élaborer une nouvelle stratégie nationale pour la gestion des déchets.

«Nous avons demandé au ministère de l’Énergie, des mines, de l’eau et de l’environnement sur la non-réalisation des objectifs de la loi 28.00 relative à la gestion des déchets, mais il n’a pas répondu», déplorent-ils.


questions à: Mustapha Brakez, expert Déchets et membre du bureau de l’ADEME

Vous dites que la loi 28-00 sur la gestion des déchets est un texte «hors la loi». Pourquoi ?
Le législateur s’est donné cinq années pour que les collectivités territoriales puissent se conformer aux dispositions de la nouvelle loi, cela n’a pas été fait et par conséquent toutes ou presque toutes les collectivités sont hors la loi puisqu’elles n’ont pas mis en place les différents plans territoriaux dans les délais. C’est le rôle de la loi de poser les évidences concernant les responsabilités en matière de gestion et de financement des opérations d’élimination des déchets.

La stratégie nationale en cours d’élaboration doit proposer la mise en application du texte législatif pour permettre d’atteindre les objectifs fixés et surtout pour contrôler et suivre les actions programmées.

Ces mesures de contrôle et de suivi doivent avoir le support de textes forts sur le plan juridique sous peine de voir les efforts entrepris réduits à néant par l’inertie des opérateurs.

Quelles sont, selon vous, les raisons du retard dans la réalisation des objectifs de la loi 28-00, relative à la gestion des déchets ?

Les objectifs de cette loi découlent beaucoup plus d’une exigence et d’une responsabilité de l’État que des préoccupations immédiates d’une collectivité locale.

Des causes structurelles comme le coût élevé des actions nouvelles, l’endettement chronique des collectivités, l’absence de consentement à payer des usagers, les difficultés de l’intercommunalité ou encore à la complexité des montages juridiques sont des freins à la mise en œuvre de cette réforme par les collectivités territoriales directement.

De plus, en l’absence de contrôle, la gestion déléguée qui apparaissait comme une solution il y a une dizaine d’années est devenue elle aussi un problème à cause de pratiques frauduleuses qui ne font qu’attirer les plus mauvais des opérateurs.

Concrètement, quelles solutions proposez-vous pour remédier à ce retard ?

Des efforts considérables ont été faits dans le domaine de l’assainissement liquide, 1/10e de cet effort permettrait d’atteindre les résultats aussi remarquables. La création d’une Agence de l’environnement, ou des déchets, de sociétés de financement fondées sur une taxe pigouvienne (une écotaxe basée sur le principe du pollueur-payeur) sont des réponses potentielles à l’exigence de qualité environnementale induite par les textes en vigueur. Par ailleurs, les opérations de recyclage restent largement informelles et obéissent à des circuits incompatibles avec une gestion vertueuse des déchets et leur valorisation.

Comment réguler ce secteur fragile, en respectant les filières acquises ? Cela ne peut être fait sans l’implication forte et décisive des pouvoirs locaux, mais c’est la régulation des marchés de la récupération des matériaux valorisables qui permet en retour la régulation des filières informelles.


Redevabilité sociale

La Banque mondiale a accordé dernièrement un prêt de 130 millions de dollars au Maroc, destiné à la réforme du secteur des déchets ménagers dans le pays. Il devrait contribuer à égaliser l’accès des citadins aux services de collecte et de traitement des ordures et à créer jusqu’à 70 000 emplois dans les activités de recyclage des déchets. Mais le plus important dans ce prêt, c’est qu’il aidera également à renforcer la redevabilité sociale grâce à un suivi régulier des services de gestion des déchets solides, et veillera à ce que la gestion des déchets ne porte pas atteinte à l’environnement.

Pour la première fois au Maroc, les usagers urbains seront en mesure de donner directement leur avis sur la qualité et la couverture des services de gestion des déchets ménagers en répondant à des enquêtes de satisfaction.

Ce programme renforcera également la transparence en donnant aux citoyens accès aux informations officielles, en particulier sur les contrats passés avec des entreprises privées.

Repères

  • ■ Selon la loi 28.00, dans un délai de cinq ans à compter de la date d’application de la loi, le territoire de chaque préfecture ou province doit être couvert par un plan directeur préfectoral ou provincial de gestion des déchets ménagers assimilés.
  • ■ La Constitution de 2011 accorde à la société civile un rôle dans l’élaboration des politiques publiques.
  • ■ La police de l’environnement sera créée pour remédier au manque de contrôle environnemental.

Publié le : 9 Mars 2013 –

SOURCE WEB Par Rachid Tarik, LE MATIN

 

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