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Pourquoi le torchon brûle entre vétérinaires et abattoirs?

Pourquoi le torchon brûle entre vétérinaires et abattoirs?

La situation « catastrophique » des abattoirs publics de viandes rouges au Maroc et leurs « conditions sanitaires » laissent planer le doute sur la qualité de la viande que reçoit le consommateur final. Une anarchie et un désordre qui remontent à l’époque du « protectorat » et que les professionnels du secteur ont du mal, ou ne désirent pas, voir en face, pour admettre le danger que cela représente pour la santé des citoyens et aménager leurs locaux selon les normes reconnues.

En dépit du fait que le problème remonte à bien longtemps, une petite guéguerre vient de naître entre l’ordre national des vétérinaires (ONV) et les propriétaires des abattoirs, à quelques semaines seulement d’Aid Al Adha, suite à la décision de l’Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA) de suspendre l’inspection vétérinaire des viandes rouges dans ces installations, à l’exception de 8 abattoirs ( 5 privés et 3 publics) jusqu’à leur mise à niveau. Une décision que l’ONV a saluée, approuvée et suivie de son côté, mais que les propriétaires de ces installations n’ont pas acceptée. Les détails

En 2018, l’ONSSA a dépêché une inspection de vétérinaires aux abattoirs du royaume (quelques 650 abattoirs ), qui ont constaté que la grande majorité de ces établissements-là ne répondent pas aux normes sanitaires et ne respectent pas la loi.

« Quand l’inspecteur de l’ONSSA se présente à un abattoir, il doit consulter et examiner l’animal vivant, c’est-à-dire, avant son abattage pour vérifier s’il ne transporte pas des maladies dangereuses, comme la tuberculose et d’autres maladies de la même famille, ce qui ne peut être détecté après son abattage. Toutefois, cela ne se passe comme ça. Une fois sur place, l’animal est déjà abattu ce qui n’est pas conforme à la loi« , souligne une source bien informée à Hespress Fr.

En effet, le décret n°2-98-617 du 5 janvier 1999 pris pour l’application du dahir du 8 octobre 1977 qui stipule, dans son article 2, que l’inspection sanitaire et qualitative des animaux vivants dans les abattoirs comprend, obligatoirement, l’examen des animaux avant et après leur abattage.

Des instructions à suivre et des délais ont donc été donnés par l’Office à ces abattoirs-là afin de réaménager leurs locaux, mettre en place les mesures minimales de propreté pour abattage des animaux, mais aussi pour la sécurité sanitaire et de l’employé et du consommateur final.

Le ministère de l’Intérieur a également réagi à ce fléau en aidant les communes dans le réaménagement de leurs abattoirs, mais en vain. En 2019, l’ONSSA a donc fait une autre évaluation et a constaté qu’en effet rien n’avait été fait.

« On a donc pris la décision de suspendre l’inspection dans les abattoirs qui ne répondent pas aux normes et on leur a donné des délais. Il y a effectivement des abattoirs dont l’inspection a été suspendue et d’autres qui n’ont pas encore écoulé leur délai, donc ils sont toujours inspectés », avance notre source.

De son côté, l’Ordre national des vétérinaires (ONV), qui a suivi « avec un grand intérêt la situation sanitaire des abattoirs et des tueries au niveau national », a exprimé son « inquiétude » et son « regret » quant à la situation des abattoirs « qui ne disposent pas du minima requis en matière d’infrastructures, d’équipements, d’hygiène et de fonctionnement » et par conséquent « ces structures ne permettent pas aux vétérinaires (relevant du secteur privé ou public) d’effectuer l’inspection sanitaire des viandes rouges conformément à la réglementation en vigueur ».

L’ONV a également salué l’initiative de l’ONSSA en appuyant fortement sa décision, « jusqu’à la mise à niveau de ces établissements-là », en suspendant également le contrôle sanitaire vétérinaire des viandes rouges dans 900 abattoirs municipaux et tueries rurales à l’exception des 8 abattoirs agrée par l’ONSSA. Une décision qui n’a pas été du goût des propriétaires des abattoirs qui ont dénoncé « un penchant envers les abattoirs privés au détriment de ceux du public« .

Pour Ouadi Madih, secrétaire générale de la FNAC, « c’est une bonne chose« . Ce militant des droits des consommateurs qui s’est confié à Hespress Fr, a avancé « qu’il y a un début à tout« , soulignant que les lobbys du secteur cherchent toujours à jouer le rôle de la victime, « ce n’est pas eux, c’est toujours les autres ».

« C’est déplorable qu’en 2019, on constate toujours qu’il y a une grande majorité des abattoirs au Maroc qui continuent de travailler dans des conditions inhumaines, que ce soit pour l’animal, mais aussi insupportable au niveau sanitaire pour le consommateur et même pour le personnel qui travaille dans ces abattoirs », souligne-t-il.

Les responsables de cette situation, poursuit notre interlocuteur, « c’est les président des communes, urbaines et rurales, qui détiennent dans la majorité des cas ses établissements, et les conditions de travail  « catastrophiques » dans lesquelles ils opèrent, les arrangent sans se soucier le moins du monde de la sécurité sanitaire et alimentaire du citoyen ».

Il a à cet égard évoqué la viande vendue dans les souks dans des conditions « lamentables sans la moindre hygiène et qui ne respectent pas la chaîne de froid« .

A priori, l’ensemble des acteurs sont d’accord sur le fait que les conditions d’hygiène, les normes de sécurité sanitaire, propreté, chaîne de froid et d’autres points ne sont pas respectés dans plus de 90% des abattoirs du Royaume, face à l’insouciance totale des propriétaires de ses établissements quant à la santé du citoyen.

Tout cela alors que les mesures imposés par l’ONSSA et par les lois qui régissent le secteur, sont à la portée et faisables, souligne Ouadi Madih .

Ce qui manque, c’est la volonté de changer les choses et changer les anciennes et mauvaises habitudes des professionnels du secteur, malgré la mise en garde de toutes les autorités, et même de la Cour des comptes qui avait dressé un rapport alarmant sur la situation des abattoirs au Maroc.

Le 11/07/2019

Source web Par Hespress

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