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Menouar Alem, ambassadeur, chef de la Mission du Maroc auprès de l'Union européenne

Menouar Alem, ambassadeur, chef de la Mission du Maroc auprès de l'Union européenne

Les perspectives de coopération entre le Maroc et l’UE sont très larges

Menouar Alem.

Le Matin : Le nouveau protocole de pêche sera soumis dans quelques jours au vote en plénière à Strasbourg. Ne risque-t-on pas de voir le scénario de l’année de 2011 se reproduire ?
Menouar Alem : En comparaison avec l’accord de 2011 qui a été rejeté, beaucoup d’éléments ont été introduits dans le nouveau protocole qui cadre parfaitement avec les demandes exprimées et par le conseil des États membres de l’Union européenne et par le Parlement européen. Nous avons tenu dans les négociations à prendre en compte les demandes et les requêtes des institutions européennes. Je pense que globalement, nous avons un accord équilibré répondant aux vœux des deux parties. En ce qui concerne la question des droits de l’Homme, il est à rappeler que les nouveaux protocoles d’accord de pêche que l’Union européenne conclut avec ses partenaires comportent cette clause. D’ailleurs, il s’agit d’une demande qui ne pose aucun problème pour le Maroc.

D’ici le 9 décembre, date de la tenue de la plénière du Parlement européen, quelles seront les actions que vous allez mener en coordination avec la diplomatie parlementaire ?
Un effort est fait en permanence auprès des eurodéputés pour les intéresser et les convaincre de l’utilité de voter cet accord. Cette action passe par un travail au niveau des groupes politiques, des commissions et auprès de certains eurodéputés qui manifestent un grand intérêt pour le secteur de la pêche. Tout ce travail est fait par la diplomatie officielle à Bruxelles et aussi au niveau de nos ambassades accréditées auprès des États membres de l’Union européenne. À ces efforts s’ajoutent ceux de la diplomatie parallèle. En effet, la Commission parlementaire mixte Maroc-UE (CPM) s’active régulièrement au sein des instances de l’UE.

Beaucoup de critiques sont adressées à la diplomatie parlementaire. Comment évaluez-vous son action au sein de l’Union européenne ?

Je crois que ce sont des critiques excessives. Je suis témoin du travail important fait par cette commission. En 2013, on a assisté à une véritable montée en puissance des parlementaires marocains. Ils sont présents dans toutes les plénières du Parlement européen et travaillent beaucoup en amont. Une parfaire coordination existe entre le ministère des Affaires étrangères et la CPM. Ainsi, on a pu obtenir des résultats fructueux. Il ne faut toutefois pas demander trop à cette diplomatie parlementaire, car elle vient de naître.Le rodage s’est fait rapidement au regard de la complexité de l’institution qu’est le Parlement européen qui n’est pas un Parlement traditionnel.

Où en est le très attendu Accord de libre-échange complet et approfondi (ALECA) ?
L’accord de libre-échange complet et approfondi avec l’Union européenne va compléter la panoplie de l’accord de libre-échange classique. Depuis mars 2012, il a atteint sa maturité. 99% des produits industriels rentrent en exemption des droits de douane et taxes en Europe et au Maroc. Il fallait donner une assise encore plus forte pour susciter un intérêt grandissant des investisseurs européens et mondiaux. Cet accord vise, en fait, à faire un rapprochement réglementaire entre les directives européennes avec la législation marocaine.

Il reste néanmoins encore beaucoup à faire sur le plan de l’adaptation de la réglementation marocaine. Qu'en pensez-vous ?

Justement, le Maroc ne part pas de zéro sur le plan réglementaire. Lorsque nous avons signé l’accord du transport aérien, une disposition permettait au Maroc de transposer dans son arsenal législatif des directives et des règlements européens. Nous allons évoluer dans des secteurs que le Maroc a considérés comme prioritaires. Cette démarche a été admise par l’Union européenne. Nous utilisons des mécanismes jusque-là réservés à des pays en phase d’adhésion à l’Union européenne, notamment le mécanisme de jumelage. Le Maroc est le premier bénéficiaire de jumelages. Nous avons 52 jumelages sur les 100 que l’UE a lancés. L’ALECA va permettre l’utilisation de tous ces mécanismes.

Vous êtes ambassadeur, chef de la Mission du Maroc auprès de l'Union européenne depuis neuf ans. Globalement quel regard portez-vous sur l’évolution des relations entre le Maroc et l’UE ?

Il y a une quinzaine d’années, le baromètre des relations entre le Maroc et l’Union européenne était «la tomate et les sardines». Il s’agit peut-être d’une exagération.Mais jusqu’au milieu des années 1990, on n’attendait que l’accord agricole et l’accord de pêche et c’est cela qui déterminait les relations avec l’Union européenne. Depuis la fin des années 90 et surtout depuis la visite royale à Paris en mars 2000, où Sa Majesté a lancé un appel à l’Union européenne pour un statut avancé allant au-delà de l’accord d’association, mais restant en deçà de l’adhésion, la réaction de l’UE a été quasi immédiate. Des perspectives de coopération très larges sont ouvertes et vont nous permettre d’évoluer vers le nouvel accord escompté. Si le Maroc a une position particulière par rapport aux autres partenaires de l’Union européenne c’est parce qu’il sait où il va et réussit ce qu’il veut.

Beaucoup d’eurodéputés sont hostiles à l’intégrité territoriale et présentent des amendements négatifs à l’égard du Maroc. Quelles sont les actions à entreprendre pour éviter leurs manœuvres ?

La position officielle de l’Union européenne est équilibrée. S’agissant du Parlement européen, contrairement à ce que certains pensent, une majorité d’eurodéputés s’inscrit dans la même ligne que l’Union européenne.Ce qui fait penser à tort que le Parlement européen a une position différenciée de celle de l’Union européenne, ce sont les manœuvres d’un groupe d’eurodéputés qui sont réunis autour ce qu’on appelle «l’intergroupe sahraoui» et qui défendent d’une manière dogmatique le «polisario» et le discours de l’Algérie sur la question du Sahara pour des raisons qui sont soit idéologiques, soit liées à certains intérêts. Quels que soient les efforts déployés, cet intergroupe maintiendra une position extrémiste et partiale vis-à-vis du dossier du Sahara. D’ailleurs, ses amendements sont systématiquement rejetés par le Parlement européen, car il est conscient que cette question commence à être utilisée d’une manière partisane. Le petit groupe est réactif, mais il est minoritaire au sein du Parlement européen. Bien sûr, il faut être vigilant, car ces eurodéputés font des actions systématiques et régulières contre notre question nationale. Nos arguments sont convaincants auprès de nos amis au Parlement européen. 

1 décembre 2013 - Bruxelles –

SOURCE WEB Par Jihane Gattioui, LE MATIN

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