Accords de libre échange Maroc-UE: L’économie verte, nouveau pivot de la relation commerciale
Après 21 ans de la mise en application de l’Accord de libre-échange entre le Maroc et l’Union Européenne, Bruxelles vient d’annoncer un réexamen de sa politique commerciale, avec un volet dédié au voisinage méridional où le Maroc fait figure de principal partenaire.
« Le renforcement des relations et de l’intégration économique de l’Union Européenne avec les pays du voisinage méridional constituera une nécessité stratégique pour la stabilité à long terme…, les négociations sur une zone de libre échange approfondi et complet sont en cours depuis plusieurs années avec le Maroc.
L’UE est disposée à discuter avec ce partenaire des solutions envisageables pour moderniser les relations en matière de commerce et d’investissement afin de mieux les adapter aux défis actuels ». C’est en ces termes que la Commission Européenne a confirmé l’intégration du Royaume dans le réexamen programmé de sa politique commerciale.
Le Pacte vert comme clé de voûte
Un chantier prioritaire pour les 27 qui s’articule autour du pacte vert pour l’Europe désignée comme la nouvelle stratégie de croissance pour l’UE. L’objectif premier de ce pacte est d’assurer une transition vers « une économie neutre pour le climat, durable sur le plan environnemental, efficace dans l’utilisation des ressources et résiliente à l’horizon 2050, avec pour ambition de réduire d’au moins 55% les émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2030».
Une orientation écologique qui est censée devenir le moteur de la compétitivité européenne pour faciliter la transformation progressive et profonde de ses économies qui auront à leur tour « une forte incidence » sur la structure des échanges commerciaux de l’Union.
Au niveau régional, cette nouvelle orientation sera portée par la mise en plan d’un nouveau partenariat entre l’UE et la rive Sud de la Méditerranée. Cette nouvelle association s’appuiera notamment sur un plan économique d’investissement pour le voisinage méridional qui visera à doper la relance socio-économique à long terme de la région.
La Commission Européenne propose ainsi de mobiliser jusqu’à 7 milliards d’euros pour la période allant de 2021 à 2027, dans le cadre de l’instrument de voisinage, de coopération au développement et de coopération internationale (IVCDCI). L’objectif premier de ce plan est de rendre la région plus attrayante pour les investisseurs.
Pour y arriver, l’UE compte établir « un engagement stratégique » avec les institutions financières internationales, notamment la Banque Européenne d’Investissement (BEI), la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement (BERD), la Banque Mondiale, le FMI, les principales banques de la région ou encore le secteur privé.
Une architecture financière qui comprend, par ailleurs, le provisionnement de garanties FEDD+ et des financements mixtes qui s’inscrivent dans le cadre de la plateforme d’investissement pour le voisinage. Un package qui devrait permettre de capter près de 30 milliards d’euros d’investissement privés et publics additionnels pour le voisinage méridional.
En tant que partenaire de référence de l’Union, le Maroc est le premier pays de larégion avec qui l’Europe compte mettre en oeuvre ce partenariat vert. Un choix qui s’explique par l’historique de coopération en la matière entre les deux partenaires, qui s’élève depuis 2010 à 700 millions d’euros, dont 320 millions en financement pour la transition énergétique.
Le Maroc en tête de file
Bruxelles a, par ailleurs, lancé en 2016 un programme d’appui à la compétitivité de la croissance verte du Royaume qui dispose d’un budget total de 105 millions d’euros, dont le dernier versement de 12 millions d’euros a été annoncé à la fin de juin dernier. Sur un autre registre, l’UE a conclu récemment un accord pour la relance des territoires ruraux marocains via l’emploi et l’entrepreneuriat dans le secteur agricole.
Le Maroc est aujourd’hui en position de renégocier sur de nouvelles bases ses accords de partenariat économique.
Cet accord bénéficiera d’un budget de 20 millions d’euros et vise notamment à accompagner les efforts d’éclosion d’une classe moyenne rurale axée sur une croissance verte. Le déploiement complet de ce nouveau programme pour la Méditerranée dépend des résultats du « dialogue stratégique », en cours depuis quelques mois avec les différents partenaires de l’UE.
« Une attention particulière sera accordée à l’échelon local pour veiller à ce que l’impact de la coopération soit réparti de manière adéquate sur le plan géographique…, le niveau de soutien financier de l’UE sera proportionné aux ambitions et à l’engagement de chaque partenaire en faveur des valeurs communes, du programme de réforme, y compris en matière de gouvernance et de leur mise en oeuvre», précise-t-on du côté du Conseil de l’Europe.
En clair, les mois à venir devraient voir l’annonce de nouveaux programmes et plateformes de coopération multisectorielle, de commerce et d’investissement sur mesure et intégrés. Reste à savoir comment cette nouvelle matrice de coopération de l’UE impactera l’offre exportatrice marocaine, notamment en termes d’adaptation aux nouvelles normes écologiques et quelle sera la marge de manoeuvre du gouvernement marocain au moment de négocier ces accords, de manière à établir un partenariat équitable à même d’encourager l’offre exportable marocaine.

3 questions à Hassan Sentissi, président de l’ASMEX

« Il va falloir revoir ces accords un par un »
Le président de l’Association marocaine des exportateurs (ASMEX) nous livre ses appréciations des accords de libre échange signés par le Maroc, alors que Bruxelles s’apprête à réexaminer sa politique commerciale.
- En tant qu’exportateur et président de l’ASMEX, quelle est votre appréciation des accords de libre échange conclus à ce jour par le Maroc ?
- Le Maroc dispose, à ce jour, de quelque 54 accords de libre échange qui le lient avec différents pays, des accords qui visaient à acquérir des partenariats win-win. Malheureusement, ces accords n’ont pas eu l’effet escompté et n’ont fait que creuser le déficit de la balance commerciale et renforcer les importations. Résultat des comptes : il va falloir revoir ces accords un par un, vu que le Maroc d’aujourd’hui et son tissu économique ne sont plus ceux du début des années 2000.
- Comment renégocier ces accords ?
- Aujourd’hui, l’économie marocaine est en quête de nouveaux marchés à l’export. Il va donc falloir renégocier les termes de ses ALE en présentant un front commun mêlant l’Exécutif aux acteurs économiques comme l’ASMEX. Le Maroc est aujourd’hui en position de renégocier sur de nouvelles bases ces accords de partenariat économiques, notamment avec L’UE. Le Brexit a changé la donne. S’y ajoute que sur les 27, l’Espagne et la France s’accaparent la majeure partie des échanges avec l’UE.
Tout le défi réside aujourd’hui à étendre le made in Maroc vers le reste de la Communauté Européenne. Autre piste à creuser : le marché continental qui n’absorbe que 3% de nos exportations à un grand potentiel avec la ZLECAF. Reste à dépasser les immenses difficultés liées à la logistique.
- L’écologie et le développement durable représentent la pierre angulaire de la nouvelle politique commerciale de l’UE, comment s’y adapter ?
- Seule l’ASMEX s’est penchée sur la question, sachant que la réorientation écologique de la politique commerciale européenne représente une épée de Damoclès pour les exportateurs marocains. L’immobilisme sur cette question peut entraîner de graves dommages pour le tissu de production marocain qui n’a d’autres choix que de se mettre à niveau très rapidement avec les normes européennes en la matière. Nous avons déjà créé, à notre niveau, une commission pour sensibiliser nos membres sur la question et nous avons fait le choix de nous faire accompagner par le français ENGIE pour bénéficier de son expertise en la matière.
Recueillis par S. A.
Le 12 juillet 2021
Source web Par : lopinion
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mardi 13 juillet 2021
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