Suisse : le principal fonds de garantie tourisme va assurer les risques entre professionnels

Comme en Allemagne, le Fonds de Garantie de la branche suisse du Voyage va changer les règles pour ses adhérents et pour les consommateurs, dès le 1er janvier 2022. A cette date, un pourcentage sera prélevé sur le prix de chaque voyage à forfait acheté en B2C, au titre d'une contribution au risque. L'objectif est double : renflouer les caisses du fonds et assurer une meilleure protection des consommateurs en cas d'insolvabilité du professionnel. Et cerise sur le gâteau : cette contribution couvrira également le risque de défaillance du tour-opérateur vis-à-vis de l'agence de voyages...
Créé en 1994, simultanément avec l'entrée en vigueur de la loi fédérale sur les voyages à forfait, le Fonds de Garantie de la branche suisse du Voyage a été mis en place par la Fédération Suisse du Voyage (FSV), avec le soutien de grands tour-opérateurs.
Émanant de la profession, cette fondation indépendante et privée garantit à l'heure actuelle environ 85% des tour-opérateurs et revendeurs de voyages suisses (en termes de chiffre d'affaires), avec un peu plus de 400 entreprises affiliées, dont les trois plus gros TO du pays (TUI, Der Touristik Suisse et Hotelplan).
Trois personnes travaillent exclusivement pour le Fonds de Garantie et deux autres sont affectées au service de médiation, géré également par le fonds.
Un besoin urgent d'évoluer
Comme de nombreux fonds de garantie tourisme en Europe, le fonds suisse se finançait jusqu'à présent par les adhésions et les cotisations annuelles de ses souscripteurs. « Ces cotisations sont calculées sur le chiffre d'affaires de l'opérateur, son niveau de risque, mais aussi sur son statut », nous explique Marco Amos, le directeur du Fonds de Garantie de la branche suisse du Voyage.
Les opérateurs du tourisme doivent également fournir de solides contre-garanties bancaires, ou financières placées sur un compte séquestre, évaluées en fonction du chiffre d'affaires réalisé. « Nous procédons également à des analyses de solvabilité sur la base des comptes annuels, qui ne vont pas impacter le niveau des cotisations, mais peuvent jouer sur les montants des contre-garanties demandées », poursuit-il.
Il faut dire que la loi fédérale suisse sur les voyages à forfait est « assez similaire à la directive européenne sur les voyages à forfait », nous explique Marco Amos. « Mais du fait qu'elle n'a pas été révisée, elle s'apparente davantage à celle de 1990 », poursuit-il.
En Suisse, donc, comme dans l'Union Européenne, les agences de voyages sont responsables envers le consommateur de la bonne exécution du contrat, indépendamment du fait que les prestations dues soient à fournir par elles-mêmes ou par d’autres prestataires de services.
Mais le système mis en place il y a plus de 25 ans commençait à battre de l'aile. « La loi exige du Fonds de protéger les consommateurs en cas d'insolvabilité d'un opérateur, mais ne nous donne pas la marche à suivre pour faire fonctionner le fonds, ni comment le financer, nous avons donc décidé de faire évoluer le système », commente Marco Amos.
Une décision qui intervient alors que, ces dernières années, les réserves du fonds ont fondu comme neige au soleil, au fil des faillites... Et que la pandémie de Covid-19 est venue aggraver la situation.
« Aujourd'hui, le risque que pèse la faillite des tour-opérateurs affiliés est estimée entre 3,5 et 4 milliards de Francs Suisses (entre 3,27 et 3,73 milliards d’euros, ndlr). Nos réserves ne sont plus suffisantes pour couvrir ce risque.
D'autant plus que les agences de voyages font moins de chiffre d'affaires depuis la pandémie et que nous estimons que les risques de faillites liés à la pandémie pourraient être plus importants dans le futur », ajoute-t-il.
Un nouveau modèle dès 2022
A cela s'ajoute une évolution fondamentale des métiers du tourisme. « Nous considérions encore beaucoup d'agences de voyages comme de simples agences de revente, alors qu'elles sont nombreuses à s'être lancé dans le micro tour-operating pour dégager davantage de revenus que la simple revente de packages », explique Marco Amos.
En proposant leur propre production aux clients directs, ces agences augmentent leur niveau de risque et donc celui du fonds de garantie...
Aussi, ce dernier a décidé de modifier les règles du jeu, en s'inspirant du modèle mis en place aux Pays-Bas par le SGR... et en faisant payer le consommateur pour sa propre sécurité.
Dès le 1er janvier 2022, une somme de 2,5 pour mille sera prélevée par l'agence de voyages sur le montant total du voyage à forfait. Sur cette part, 2 pour mille sera versée au fonds de garantie et les 0,5 pour mille restants seront conservés par l'agence pour les frais de dossier.
« Plutôt que de demander à nouveau du cash à nos affiliés, nous avons privilégié cette approche afin de valoriser l'aspect « sécurité » à passer par une agence de voyages. Si le client voit qu'il paye quelque chose pour sa sécurité, ce service prend de la valeur. L'agent de voyages peut lui expliquer le principe et les avantages à passer par un professionnel plutôt qu'en direct », commente Marco Amos.
En annonçant ce montant de 2,5 pour mille, le fonds de garantie suisse veut jouer la carte de la transparence vis-à-vis du consommateur, qui sait combien et pourquoi il paye. Une différence avec le nouveau système allemand qui, lui, impose aux opérateurs de tourisme de payer une cotisation annuelle à hauteur de 1% du CA des voyages à forfait et 5% du CA des voyages à forfait pour les contre-garanties... et qui risque de se répercuter, ni vu ni connu, sur la facture du client.
En outre, ce système va permettre au fonds suisse de mieux contrôler ses affiliés, en voyant quelles sont les agences de voyages qui proposent du voyage à forfait et celles qui ne font que de la revente.
Au final, le but de la manœuvre, « ce n'est pas de s'enrichir, mais de reconstituer les réserves du fonds pour répondre aux directives exigées par la loi », souligne-t-il.
Avec un autre effet : à partir du 1er janvier 2022, le risque lié au fournisseur, c'est-à-dire le risque de défaillance d’un tour-opérateur vis-à-vis d’une agence de voyages, sera couvert pour les adhérents au Fonds de garantie entre eux. Cette décision n'est pas une obligation légale, mais une volonté du fonds de garantie.
Ce modèle, de nombreux opérateurs de tourisme français aimeraient le voir se mettre en place dans l'Hexagone...
En Suisse, un autre garant financier, la TPA (Travel Professional Association), devrait se développer dans la même direction, nous indique Marco Amos.
Et si ce changement de fonctionnement était nécessaire, Marco Amos relativise : « Nous n'avons connu aucune défaillance en 2021, et les entreprises ont bénéficié de nombreuses aides d'Etat, comme le chômage partiel qui court jusqu'au début de l'année 2022, ainsi que des aides directes.
Par conséquent, même si la solvabilité de nos affiliés n'est pas aussi bonne qu'il y a deux ans, elle n'est pas aussi mauvaise que ce que nous pouvions craindre. Nous attendons de voir ce qui nous attend pour 2022 et 2023... ».
Le 19 Octobre 2021
Source web Par : tourmag
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