L’arganeraie marocaine, un système traditionnel face aux mutations récentes : le cas du territoire des Haha, Haut Atlas occidental Par Hassan Faouzi
Par Hassan Faouzi
Dans Norois 2017/1 (n° 242), pages 57 à 81
Introduction
Le système agraire de l’arganeraie des Haha s’articule autour de l’arganier et sa production de noix d’argane, l’élevage de petits ruminants, surtout des caprins, et la culture de céréales, principalement l’orge. L’occupation de l’espace obéit à des règles complexes issues de la juxtaposition de trois législations : la législation forestière, qui distingue le territoire privé du territoire domanial, la loi coranique, qui définit les règles d’héritage, et le droit coutumier, qui organise, au sein du territoire domanial, la répartition des parcelles entre les usagers et leur utilisation au cours de l’année.
Autrefois, et jusqu’au début du xx e siècle, cette arganeraie donnait lieu à une exploitation beaucoup plus systématique qu’aujourd’hui. Elle constituait parfois l’unique recours pour la survie de la population. Le pâturage, la céréaliculture en bour, huile d’argane et le bois étaient les principales ressources fournies par l’arganeraie et elles favorisaient le maintien en place de cette population rurale aux conditions très modestes. L’arganier, arbre sacré, a toujours été considéré comme un bien familial et d’ailleurs il a toujours eu une valeur sentimentale. L’exploitation traditionnelle de l’arganeraie était la seule pratique qui existait et qui fournissait même un revenu appréciable en préservant les peuplements d’arganiers. À l’heure actuelle, la mondialisation, la pression démographique et l’expansion de l’agriculture ont tendance à détruire ce patrimoine. En effet, on assiste ces dernières années, au sein de cette forêt, à un changement dans la gestion de l’espace (Faouzi, 2003).
Le présent article a pour objectif d’analyser l’impact de ces mutations récentes, tant sur les populations locales que sur les ressources à partir de l’exemple de l’arganeraie des Haha. Dans cet article, nous nous interrogeons aussi sur la durabilité de l’arganeraie et également sur la question de savoir si les prochaines générations verront-elles encore des forêts d’arganiers et si elles pourront aspirer à un meilleur niveau de vie que leurs parents.
Pour répondre à ces questions, notre analyse s’appuie sur différentes approches scientifiques : recueil de données écologiques, une série de photographies aériennes, photos satellite, observations sur le terrain, enquêtes et entretiens avec la population locale et les acteurs locaux. Le choix de l’arganeraie des Haha s’explique par le fait que c’est dans celle-ci que la problématique de la recherche avait été établie et que des travaux avaient été entrepris antérieurement (Benzyane, 1989 ; Ponteves, 1989 ; Person, 1998 ; Faouzi, 2003). L’arganeraie des Haha souffre d’un certain nombre de handicaps tant physiques qu’humains qui rendent compte de sa transformation progressive et de l’ouverture tardive vers le monde extérieur de cette région restée longtemps marginalisée, enclavée, à l’écart des principaux axes de circulation. Si l’axe nord-sud qui relie le nord et le sud du Maroc traverse les deux principaux centres ruraux des Haha qui sont Tamanar et Smimou, il ne permet pas de relier les autres régions des Haha aux centres urbains (figures 1 et 2). Dans cette zone du Maroc, région de vieille sédentarisation, où vivent environ 190 218 habitants (Haut Commissariat du Plan, 2004), les caractéristiques socio-économiques et les conditions de vie deviennent de plus en plus dures ; phénomène qui s’est accentué avec les récentes années de sécheresse.
Les tags en relation
Les articles en relation
12 classes bioclimatiques seront construites à Agadir
La ville veut devenir leader au niveau national La construction de ces classes bioclimatiques adaptées aux conditions climatiques locales permettra une amé...
Le comité d’orientation stratégique de l’ANDZOA se réunit à Agadir
L’exécution de programmes de développement intégrés apporterait une réelle valeur ajoutée aux zones oasiennes et de l’arganier. Ces dispositifs gar...
Valorisation des Oasis : La Déclaration de Ouarzazate
La Déclaration universelle de Ouarzazate pour la valorisation et la préservation des oasis du monde en tant que patrimoine naturel et culturel de l’humanit�...
Sidattes-Erfoud 2023 : Près de 230 exposants attendus
Le 12ème Salon revient du 3 au 8 octobre Evènement Ce 12ème Salon qui sera déployé sur une superficie de 40.000 m2 vise à mettre en avant l’import...
Le 6ème Forum international des oasis se déroule à Zagora
Initiée par l’Association du Forum, la sixième édition du Forum international des oasis et du développement durable aura lieu, du 27 février au 2 mars 20...
Plantation massive de palmiers : les écologistes appellent à "arrêter le massacre"
L'identité visuelle et paysagère des villes marocaines est en passe d’être défigurée ! De Tanger à Dakhla, en passant par Oujda, Berkane, Nador, Al ...
Zones oasiennes : l’ANDZOA poursuit sa trajectoire de développement pour les années à venir
Le ministre de l’Agriculture, de la Pêche Maritime, du Développement Rural et des Eaux et Forêts (MAPMDREF), Mohammed Sadiki, a présidé ce 21 novembre à...
L’arbre sacré des régions du Sud: Les gardiennes de l’arganier
L’Union des coopératives des femmes d’argane s’est distinguée à la COP22 en remportant le prix de l’adaptation climatique qui lui a été remis par l...
Pourquoi Aziz Akhannouch et Nadia Fettah Alaoui étaient dans la région de Tiznit
Le ministre de l’Agriculture, de la Pêche Maritime, du Développement Rural et des Eaux et Forêts, Aziz Akhannouch et la ministre du Tourisme, de l’Artisa...
Lutte contre les pertes alimentaires : Un projet pilote lancé dans des zones oasiennes
Pour lutter contre les pertes alimentaires au Maroc, un projet pilote vient d’être lancé la semaine dernière et qui porte sur l’appui à la réduction de...
Dans le Sud du Maroc, à la recherche du patrimoine juif oasien
Au coeur d'une synagogue de la palmeraie d'Akka, deux archéologues, un Marocain et un Israélien, scrutent le sol à la recherche du moindre fragment, ...
Maroc : la production de dattes est passée de 90.000 à 127.000 tonnes
La production de dattes au Maroc est passée de 90.000 à 127.000 tonnes. Le Plan Maroc Vert a accordé une importance particulière à la filière phoenicic...