L’ordinateur quantique : 3 minutes pour un calcul qui prend 10 000 ans à un supercalculateur classique
C’est un monstre. Capable de réaliser des opérations sans équivalent. De faire plusieurs calculs à la fois. Ses capacités sont immenses, donc. Pour le meilleur et pour le pire : l’ordinateur quantique pourrait facilement casser les plus sophistiqués de nos codes secrets. On fait connaissance ?
Un calcul fait en trois minutes au lieu de… 10 000 ans. Cette opération quantique réussie par Google fin septembre a fait frémir le monde informatique, en quête de son Graal : l’ordinateur quantique universel.
En quoi consiste-t-il ? À quoi servirait-il ? Va-t-il « cracker » tous nos codes ? Décryptage d’une technologie scientifique qui défie l’entendement.
Une mécanique contre-intuitive
La recherche en informatique quantique, apparue dans les années 1980, repose sur l’un des principes de la physique quantique appelé superposition. Selon cette mécanique, un objet peut avoir deux états en même temps : une pièce de monnaie à la fois pile et face, alors que dans le monde « classique », elle ne peut être que l’un ou l’autre à la fois.
Ce mécanisme contre-intuitif, « même les scientifiques les plus imaginatifs ont du mal à le comprendre, parce qu’il ne se joue pas au niveau sensible », explique Audrey Loridan-Baudrier, de la Fondation Mines-Télécom, qui forme de futurs ingénieurs à cette technologie.
Tout objet est quantique, « même vous et moi », relève Daniel Hennequin, physicien. « Mais ces propriétés quantiques sont très vite perdues et plus l’objet est gros, plus la perte est rapide », détaille ce chercheur au CNRS.
À une échelle microscopique, il est en revanche possible de prolonger l’état quantique, avec des atomes simples, froids, isolé.
On peut ainsi fabriquer des qubits, brique de base de l’informatique quantique. Mais leur manipulation est délicate car ils sont difficiles à stabiliser et les fabricants ont du mal à dépasser les 53 qubits.
Ils sont néanmoins déjà capables de performances spectaculaires, comme l’a montré le processeur de Google qui a calculé en 3 minutes là où un supercalculateur classique aurait mis des milliers d’années.
Des opérations sans équivalent
Pourquoi un tel écart ? Contrairement aux bits classiques qui ne peuvent se trouver que dans deux états (0 ou 1), les qubits ont une infinité d’états possibles, pouvant se superposer. « C’est un parallélisme qui permet de faire plusieurs calculs à la fois », résume Jean-Paul Delahaye, chercheur en informatique.
On arrive ainsi « à des algorithmes sans équivalent dans le monde classique qu’on a même du mal à se représenter », selon Daniel Hennequin.
La « solution quantique » s’avère utile lorsque le problème est « tellement complexe, ou la masse de données tellement énorme que les supercalculateurs classiques ne suffisent plus », analyse Audrey Loridan-Baudrier.
L’ordinateur quantique aurait donc un impact considérable sur nos capacités à traiter les informations.
Des applications concrètes utilisant des systèmes hybrides classique/quantique existent déjà. L’une d’elles arrive par exemple à résoudre rapidement le « problème du voyageur de commerce » qui doit optimiser son trajet pour aller dans 100 villes différentes.
Menaces sur la cryptographie
L’algorithme quantique le plus prometteur est celui de Shor, capable de factoriser aussi vite que de multiplier, alors que dans un calcul classique, il y a une différence de temps de résolution entre les deux opérations. « Si je vous demande de quels nombres 437 est le produit, vous mettrez du temps à trouver. À l’inverse, si je vous demande de faire la multiplication 19 x 23, vous trouverez bien plus rapidement 437 », observe Daniel Hennequin.
Pour l’heure, le quantique n’arrive à factoriser que des nombres de 7 ou 8 chiffres et l’ordinateur classique reste bien plus puissant, souligne Jean-Paul Delehaye.
Mais le jour où un ordinateur quantique universel réussira à exécuter l’algorithme de Shor à grande échelle, avec des nombres à 100 chiffres, on parlera alors de « suprématie quantique ». Cela remettrait en cause toute la cryptographie régissant nos codes de sécurité (cartes de crédit, etc.), qui est fondée sur la longueur de la factorisation (l’algorithme RSA).
Pour parer à cette menace, la recherche en cryptographie résistante a déjà pris les devants. « Elle est même plus avancée que l’ordinateur quantique », assure Daniel Hennequin.
Le 21/10/2019
Source web Par ouest-france
Les tags en relation
Les articles en relation
Les déplacements à Casablanca reviennent à la normale, selon les données d'Apple
Selon les données arrêtées au 29 juin, soit quelques jours après l’entrée en vigueur d’importantes mesures d’allègement du confinement, la courbe de...
Quand les GAFA s’insurgent contre la France, c’est le branle-bas de combat
C’est à l’unisson que les géants d’internet, Google, Amazon, Facebook et Apple (GAFA) se sont élevés lundi dernier contre la taxe du même nom, Gafa (...
Le Maroc compte taxer Facebook et Google
Avec ses 16 millions d’utilisateurs au Maroc, Facebook réalise des bénéfices record dans le pays. Les autorités marocaines comptent bien demander leur par...
Coronavirus: Google envisage de publier des statistiques sur le déplacement de ses utilisateurs
En vue d’aider les pouvoirs publics à évaluer l’efficacité des mesures de distanciation sociale, le géant américain Google compte à partir de ce vendr...
Intelligence artificielle : Google dévoile son modèle IA de pointe pour rivaliser avec ChatGPT
À l'instar de nombreux acteurs mondiaux, Google se lance dans la création d'une version améliorée de son Intelligence Artificielle, visant à être ...
Laurent Daudet, fondateur d'un modèle alternatif à OpenAI : "Il n’est pas trop tard, mais il est
Le spin-off français a développé son propre modèle, alternative à OpenAI, qui permet aux entreprises de garder le contrôle sur leurs données. Les géa...
Dossier de l’été : Google et Amazon, nouveaux acteurs du Travel
Les géants américains investissent dans le marché du tourisme et ambitionnent de devenir des acteurs à part entière. Technologie conversationnelle, nouvell...
84% des marocains utilisent désormais WhatsApp
Le système de messagerie WhatsApp est utilisé par 84% des Marocains en 2021 et 79% d'entre eux l'utilisent d'une manière quotidienne, révèle le...
#GAFA_PARIS_TAXES_INTERNET: Fwd: Taxes/Internet: Paris ne recule pas devant les GAFA!
Pour rappel, le Parlement français a adopté en juillet 2019 une taxe de 3% sur le chiffre d’affaires des géants du numérique, faisant de la France un pays...
Wall street: des plongeons à deux chiffres
Après avoir mené Wall Street à des sommets historiques cette année, les grandes valeurs technologiques traversent désormais un automne très chahuté, cara...
Comment les chaînes peuvent améliorer leurs opérations grâce au feedback client
L’une des principales problématiques des groupes hôteliers réside dans la capacité à fournir des prestations de qualité qui répondent à des standards ...
Demain vendrons-nous nos données personnelles ? Y a t-il un ras-le-bol des consommateurs ?
La data est partout, vous en entendez parler à toute les sauces, mais peu de médias parlent du problème que pose le vide juridique laissé, par la propriét�...