#MAROC_ACCORDS_LIBRE_ECHANGE
Depuis dix ans, Tarik Haddi gère Azur Partners, une société de gestion de fonds de capital investissement dédiée à l’agriculture et à l’agro-industrie. Le capital-risqueur livre son avis sur les opportunités d’investissement publiées dernièrement par le ministère de l’Industrie.
Challenge : que pensez-vous de la banque de projets industriels que le ministère de l’Industrie vient de mettre en ligne ?
Tarik Haddi : c’est une excellente initiative qui devrait permettre d’assurer la cohérence des projets entrepreneuriaux avec les politiques industrielles de notre pays et d’optimiser les aides de l’Etat. Cette initiative est en fait une excellente illustration d’un partenariat public privé intelligent.
Challenge : ces projets sont-ils si attractifs pour attirer les investisseurs marocains et par ricochet limiter, voire arrêter certaines importations de produits en les substituant par une production locale, sachant que le Maroc a signé plus d’une cinquantaine d’accords de libre-échange ?
T.H : le Ministère de l’Industrie, du Commerce, de l’Économie Verte et Numérique, qui est en charge du Commerce Extérieur, est à même justement d’évaluer ce qui peut être lancé comme projet en adéquation avec les accords de libre-échange signés par le Maroc. A titre personnel, je pense qu’il est temps de renégocier certains de ces accords pour s’adapter à l’économie post-Covid, dont on commence à voir les prémices à l’échelle internationale. Je pense aussi, qu’il faudra être vigilant à veiller à la compétitivité des projets de substitution aux importations, notamment en les poussant à intégrer l’export pour être soumis en permanence à la concurrence internationale. Sinon, nous risquons de reproduire les erreurs du passé et mettre à mal toute la compétitivité de nos chaines de valeurs locales.
Challenge : pour inciter davantage les industriels à saisir les opportunités d’investissement dans les projets qu’il a présentés, la tutelle met en avant également un certain nombre d’avantages d’investissement notamment les subventions, du foncier potentiel, l’aide à la formation ou encore le financement. Est-ce suffisant ?
T.H : il faudra compléter le dispositif par un meilleur accès au capital investissement. En effet, pour remettre nos entreprises sur les chemins de la croissance et de la rentabilité, il faudra des financements en fonds propres combinés à une vision stratégique pertinente, une gouvernance améliorée et un monitoring par des professionnels aguerris… et ça, les financements bancaires ne le fournissent pas. Aussi, faut-il accélérer la mise en place du Fonds Stratégique pour renforcer les fonds d’investissement existants et en créer de nouveaux. Il faudra également améliorer le cadre règlementaire des fonds de capital investissement, en accélérant la refonte de la loi sur les OPCC (les organismes de placement collectif en capital, ndlr) , pour permettre à tous les fonds exerçant au Maroc d’y accéder.
Enfin, le cadre fiscal du capital investissement doit impérativement être revu pour pouvoir attirer les Institutionnels à investir dans les fonds marocains. Plus particulièrement, un crédit d’impôt doit être institué pour les investisseurs, personnes physiques ou morales, qui investissent dans les fonds domiciliés au Maroc et il faudra rétablir l’équité fiscale par rapport à la TVA sur les frais de gestion des fonds de capital investissement, à l’instar de ce qui se fait partout ailleurs. Il faut bien comprendre que cette TVA sur les frais de gestion des fonds non remboursés renchérit le fonctionnement des fonds marocains et grève ainsi, la compétitivité de la place Maroc au détriment des autres places régionales.
Le 7 Octobre 2020
Source web Par : challenge
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